Après le monde universitaire érudit et masculin du « maître des illusions » Donna Tartt nous emmène dans un monde essentiellement féminin et rural. Dans un coin reculé du Mississipi, entre une mère shootée aux antidépresseurs, une sœur à la cervelle d’oiseau et des tantes dignes des romans d’Agatha Christie, vit Harriet, 12 ans, délurée et têtue, qui n’a d’amis que ses livres, principalement « l’île au trésor » et « le livre de la jungle ». Un jour, au cours de catéchisme, une illumination la saisit : elle doit retrouver l’assassin de son frère, décédé quelques années plus tôt.
Mais on a beau se croire une détective redoutable, quand on est coincée dans un corps de petite fille, les choses sont moins faciles que dans les histoires. Elle choisit alors Hely comme adjoint, garçon de son âge, vaguement amoureux d’elle et tout entier dévoué à sa cause. Mais le petit copain sera-t-il vraiment à la hauteur ?
( A cet égard, le titre français a été judicieusement traduit – ce qui est rarement le cas – par le petit copain et non le petit ami. C’est important )
Comme dans « Le maître des illusions », avec le meurtre comme charnière et comme catalyseur, Harriet, au travers d’une quête initiatique, va perdre ses illusions et les rêves qui rythmaient sa vie d’enfant. C’est que le monde des adultes auquel elle se confronte est impressionnant et bien éloigné de son quotidien. Il est représenté par une famille de tarés particulièrement hargneux et stupides, fabricants d’amphétamines, dresseurs de serpents et racistes notoires que l’auteure nous décrit avec une justesse malicieuse pleine de bonheur.
On s’est plaint ça et là de longueurs, d’absence d’histoire et d’intrigue etc…
Quel dommage de ne pas avoir su prendre la pleine mesure de ce livre. Donna Tartt n’est pas la comtesse de Ségur, son texte est exigeant, déroutant, parfois même difficile. D’intrigue, il n’y en a pas – on ne saura jamais qui est l’assassin – et de complaisance envers le lecteur, aucune. C’est à nous de fournir l’effort pour entrer dans son monde. Et pour y entrer, il suffit de se laisser bercer, par ses mots, ses phrases et son écriture hypnotique, comme dans un hamac, dans la chaleur moite et la torpeur du Sud, bercé par des vieux airs de blues. C’est alors qu’apparaîtra toute la magie de son écriture, mélange de fantaisie, de mystère, de noirceur et de poésie.

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le 9 août 2016

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