Virginia Woolf, c’est vraiment de la littérature : à partir d’une simple marque sur un mur, elle déroule toute une rêverie, superbement exprimée. C’est ce qu’on appelle le flux de conscience, qui fait la singularité de son écriture : elle laisse jouer les associations d’idées, sautant du coq à l’âne comme peut le faire un esprit rêvassant.


Dès lors, il faut la suivre. Je n’y suis pas toujours parvenu : rien saisi à la nouvelle éponyme, Le quatuor à cordes. OK pour les bribes de phrase glanées çà et là dans le public, mais lorsque l’écrivaine nous entraîne dans son "flot mélancolique", traduction, sans doute, de ce que lui évoque la musique de Mozart, je tombe à l’eau, sans parvenir à remonter à bord.


Je m’en suis mieux tiré sur les suivantes.


Kew Gardens, qui passe d’un promeneur (ou couple de promeneurs) à l’autre, lui prêtant des pensées.


La marque sur le mur donc, où l’on part des anciens propriétaires de la maison, débouche sur les choses que nous avons perdues et le cycle de la vie, de là imagine… Shakespeare au coin du feu, les règles de la bonne société britannique, le patriarcat, la prétention des hommes à tout expliquer, pour que cette marque sur le mur finisse par s’apparenter à une planche de salut comme réalité tangible, sur laquelle on peut s’appuyer. Et ce n'est pas encore fini. Je ne décris pas tout.


La dame dans le miroir prolonge la vue que l’on a du miroir dans l’entrée, montrant une dame d’âge mur dans son jardin. Puis raconte l’effet que peut avoir un miroir accroché au mur, en tant qu’objet renvoyant un reflet. Conclusion : « on ne devrait pas laisser les miroirs accrochés aux murs de sa chambre ».


La duchesse et le joaillier est sans doute la plus accessible des nouvelles de cet ouvrage. Il y est question du besoin réciproque d’une noble et d’un commerçant. L’une profite de son statut pour faire une bonne affaire, l’autre est flatté de cette visite. C’est finalement en spéculant non sur un gain financier mais sur une relation amoureuse qu’il signera le gros chèque.


Enfin, Lappin et Lapinova est un amusant texte sur l’identification d’un couple à deux sympathiques rongeurs. Un jeu qui les isole du reste du monde, notamment ce monde aristocratique que Virginia Woolf dépeint avec acidité. Le sentiment amoureux s'accroche parfois à d'infimes détails. Le jour où le nez d’Ernest ne frémit plus, le mariage s’achève. Restera la vie de couple.


Le ton est fortement mélancolique, voire dépressif. La langue est belle, mais il faut s’accrocher pour tourner les pages. Pour suivre la romancière, il faudrait réussir à entrer dans sa tête. On n’y parvient pas toujours.

Jduvi
7
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le 16 oct. 2021

Critique lue 60 fois

Jduvi

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