Quand j'ai lu le pitch de ce roman, j'ai immédiatement pensé au film Iron sky.
Le postulat de départ est en effet qu'à la fin de la guerre, plusieurs centaines de nazis ont quitté la Terre à bord de fusée pour rejoindre la Lune et s'y installer sur la face obscure de notre satellite. Toutes ces années, ils les ont passé à planifier leur retour sur Terre et leur revanche.
Du coup, plagiat ? Et de qui sur qui si c'est le cas ?
Et bien évacuons tout de suite la question : pas plagiat. Car la romancière Johanna Sinisalo a travaillé sur le scénario d'Iron sky et en a tiré ce roman, qui en reprend la trame, en plus étoffé.
Le livre reprend donc la trame narrative que ceux qui ont vu le film connaissent, et de ce côté là, aucune surprise à attendre donc. Je ne vais évidemment pas la spoiler ici, vous lirez le livre / verrez le film / ou les deux, selon vos envies.
Là où le roman est intéressant, et de mon point de vue plus que le film, c'est dans la construction de son univers et dans sa recherche de cohérence. Déjà, le livre est complètement centré sur une héroïne nazie, née sur la Lune et farcie de propagande, qui nous explique, via un journal intime rédigé des années après les faits, comment elle a réalisé qu'on lui avait menti sur le nazisme et sur la Terre.
Toute la première partie du récit est donc très différente du film, car elle sert à une mise en place et une contextualisation de bon aloi de la base lunaire, de son fonctionnement (tant sur le plan sociétal que sur les aspects bassement matériel). Car Sinisalo tient à ce que son récit soit cohérent et cette base lunaire crédible, et elle prend le temps d'expliquer comment la survie a été rendue possible toutes ces années. Un luxe que le film ne pouvait pas s'offrir.
Cette partie d'exposition n'est cependant pas roborative, et est même très intéressante quand on s'attarde sur les questions scolaires (notamment sur l'Histoire de la Terre) et la société sélénites qui est en avance sur certains aspects (technologie spatiale à Hélium 3 ; écologie ; recyclage) et figé dans les années 40 sur d'autres (production culturelle inexistante et limitée aux films allemands d'avant 1940 ; communications poussives).
Et c'est la grande réussite du roman : sa cohérence.
J'ai beaucoup aimé l'écriture de Sinisalo, notamment sur l'aspect émotionnel de son héroïne, dont elle décrit avec beaucoup de finesse les émois amoureux, notamment adolescent.
Le roman souffre en revanche des mêmes faiblesses que le film sur la fin : les évènements sont un peu précipités et le récit perd en crédit au profit d'un côté pastiche très (trop ?) prononcé.
Mais je ne vais pas bouder mon plaisir, le roman est très plaisant et très intéressant. Je suis bien content de l'avoir lu, même en connaissant la fin.