Après Bilbo le Hobbit puis Les Enfants de Húrin, je poursuis ma route dans les contrées de Tolkien et je me suis cette fois-ci enfin attaquée à son chef d'oeuvre ultime : Le Seigneur des Anneaux. On m'avait offert la Communauté de l'Anneau à l'âge de 11 ans, mais étant à l'époque une amoureuse transie de Harry Potter (ça n'a pas beaucoup changé d'ailleurs ...) je n'avais pas accordé beaucoup d'intérêt à ce livre, dont je ne connaissais absolument pas l'auteur, et encore moins l'univers. Evidemment, la trilogie cinématographique a changé bien des choses depuis !
J'avais déjà effectué plusieurs tentatives de lecture au fil des ans, mais qui se sont au final transformées en échec à chaque fois... J'avais vraiment du mal à accrocher au style de Tolkien que je trouvais lourd, et son univers me paraissait vraiment complexe et hors de portée en comparaison avec Harry Potter, qui est vraiment très accessible, surtout pour les plus jeunes. Bref, j'arrivais jamais à aller plus loin que le prologue sur les Hobbits. J'aurais sans doute dû commencer par Bilbo (et c'est ce que j'ai fait, mais bien trop tard) mais il y a 10 ans je ne connaissais pas du tout le bouquin, et j'avais jamais pensé à l'acheter en fait. La Communauté de l'Anneau m'avait franchement rebuté et je me réservais l'oeuvre de Tolkien pour plus tard, quand je serai vraiment adulte et en âge de bien tout comprendre, et surtout en âge d'apprécier. A 18 ans j'ai quand même réussi à lire le premier tome, mais c'était presque dans la souffrance, à tel point que je ne me souvenais quasiment de rien, et je n'avais même pas réussi à terminer les Deux Tours. J'ai dû m'arrêter bien avant la bataille du Gouffre de Helm je crois. FAILED.
Cette fois-ci j'étais vraiment motivée, je voulais redécouvrir cette histoire d'un oeil neuf. Il me fallait retirer cette épine du pied que je me trimballais depuis plus de 10 ans. J'ai toujours eu honte de n'avoir jamais lu le Seigneur des Anneaux alors que je voue un culte quasi religieux aux films de Jackson. C'était mon pêché impardonnable et inassumé, le fardeau que je portais avec moi chaque jour, mais je savais que tôt ou tard j'obtiendrai l'absolution. Il ne pouvait en être autrement, je devais faire moi aussi mon chemin de croix. Je ne pouvais quand même pas passer le reste de ma vie sans avoir lu la Bible de la Fantasy tout de même !
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Sérieusement, j'ai encore été très très surprise. Comment j'ai pu me persuader une seule seconde que le style de Tolkien était repoussant à ce point ? Bordel, qu'est-ce qu'il m'est passé par la tête ?! Parce que ça se lit plutôt facilement en fait ! Bon ok, je continue de penser que s'attaquer à LSDA quand on a moins de 15 ans relève du sado-masochisme et de la folie, mais au final c'est pas si insurmontable que ça. Je pensais que j'allais galérer et tout comme la première fois, et puis en fait pas du tout ! Je l'ai lu avec le même enthousiasme et avec le même plaisir que Bilbo ou les Enfants de Húrin. C'est sûr que le style est quand même pas des plus accessibles, et que j'ai parfois dû avoir recours au dico (eh oui ...), mais ça va quoi. Et certes, il y a plus de descriptions qu'il n'y a d'actions - même que des fois tu te demandes si t'es pas en train de lire "Mon copain des bois" ou "le Guide du routard" - mais c'est pas plus chiant que les livres des grands auteurs qu'on nous forçait à lire en cours de français en tout cas. Faut juste se plonger vraiment dans le truc, être à fond dedans et ne pas louper le coche dès le départ, sinon c'est mort après. Si on y regarde bien, c'est très instructif en fait ! Grâce au père Tolkien les arbres n'ont plus de secret pour toi, tu connais toutes les espèces possibles ! Tu peux désormais utiliser 30 synonymes pour dire le mot colline, et au moins 30 autres pour le mot fougère ! En gros, tu deviens rapidement une bête en français et ça c'est la classe. En tout cas, j'ai vraiment lu la trilogie avec beaucoup de plaisir et d'intérêt, et de rapidité aussi. Certes, c'est pas aussi léger ou prenant que Bilbo je trouve, mais j'ai aimé.
Bon par contre, pour ceux qui ont lu d'abord LSDA avant Bilbo, ils se font spoiler comme des gros porcs car les références à ses aventures sont vraiment très très nombreuses, particulièrement dans la Communauté de l'Anneau. Personnellement, ça ne m'a pas du tout gêné. Au contraire j'ai vraiment adoré les liens qu'il y avait entre les deux, voir comment certaines actions du passé ont pu avoir de nombreuses conséquences sur le présent, en apprendre sur le devenir de certains personnages et de certains lieux, ce sentiment nostalgique qui s'empare de nous et des personnages... ça m'a encore plus fait aimer l'histoire de Bilbo le Hobbit ! Alors oui, c'est certes essentiel pour comprendre en partie le contexte du LSDA et de la mise en place de l'histoire, mais j'imagine que pour certains qui ont lu Bilbo par la suite, ça devait avoir moins de saveur et c'est un peu dommage que Tolkien s'auto-spoil comme ça mais bon...
A part ça, j'ai vraiment trouvé le début très long... Je trouve que l'histoire prend vraiment beaucoup de temps à démarrer, du moment où Frodon quitte la Comté jusqu'à ce qu'il trouve Aragorn, ça occupe beaucoup de chapitres pour au final pas grand chose. Certes c'est jamais déplaisant à lire, mais ça manque quand même de rythme. A part marcher, bouffer, dormir et se perdre, les Hobbits font pas grand chose. Perso, j'approuve tout à fait les choix scénaristiques et les coupures opérés par Jackson pour le 1er film, à mon sens c'est justifié. Tom Bombadil par exemple reste un personnage plaisant, mais pas d'un intérêt majeur au niveau de l'histoire, il est plus anecdotique qu'autre chose. J'approuve donc le choix de l'avoir fait disparaitre du film, d'autant que certaines de ses répliques ont été réutilisées pour Sylvebarbe ou même Gandalf, on y fait donc quand même référence. Mais une fois que la Quête démarre vraiment, à partir du Conseil d'Elrond, c'est que du bonheur ! On redécouvre totalement des choses, des personnages, des lieux, on en apprend un peu plus sur l'histoire de la Terre du Milieu et le Premier Age, on voit la Quête autrement. J'ai complètement redécouvert l'histoire. Et surtout, on se rend bien compte que LSDA n'est qu'une pièce de l'immense puzzle créé par Tolkien, et on se dit juste que c'est un truc de malade ! Je constate également que Peter Jackson a repris beaucoup de dialogues et de citations tirés directement des livres au final, et même s'il a parfois modifié certains passages ou en ajouté d'autres (que ça plaise ou pas), je trouve que le travail d'adaptation est tout à fait honnête et je suis contente de ce constat.
Dans les Deux Tours, ce qui m'a surtout marqué c'est le passage dans l'antre d'Arachne. Tolkien décrit avec un talent fou l'horreur et l'angoisse que Frodon et Sam doivent affronter. C'est tellement bien écrit que ça me faisait vraiment froid dans le dos, encore plus qu'en matant le film j'trouve. Sinon je suis un peu déçue de la bataille du Gouffre de Helm, je pensais qu'elle s'étalerait sur beaucoup plus de pages que ça. En tout cas, je continuais de poursuivre l'histoire avec beaucoup de délectation ! Tolkien conclut sa trilogie avec maestria grâce au Retour du Roi. Que dire ... Emotion. Il a réussi l'exploit de me faire arracher 2-3 larmes (la mort de Theoden, les Havres Gris). Seule JK Rowling était parvenue à me faire chialer en lisant un livre avant cela. Voilà, j'ai enfin réussi à aller jusqu'au bout de cet objectif ! J'ai l'impression d'avoir moi-même jeté l'Anneau dans la Crevasse du Destin... Comme disait Frodon dans le film : "ça y est, c'est fait !". Je me sens vraiment fière de moi ! Je peux donc désormais mourir la conscience tranquille...
En tout cas, il n'y a pas à dire : Le Seigneur des Anneaux est une oeuvre littéraire grandiose, qu'on le veuille ou pas. Si je reste tout même plus attachée à l'histoire de Bilbo pour son côté plus léger, LSDA est clairement une invitation au voyage, aussi bien dans le monde imaginé par Tolkien que dans le notre, le vrai. On peut y interpréter les choses de tellement de façons différentes que c'est là qu'on constate toute la profondeur de l'histoire et du talent de l'auteur. Perso, LSDA reste pour moi une métaphore d'un voyage initiatique, voire spirituel. Une façon de nous dire qu'il faut se lancer dans la vie et aller jusqu'au bout des choses, même si le parcours est semé d'embûches et même si au fond de nous on préfère notre confort et notre petite vie pépère comme celle des Hobbits. Si on arrive à aller au bout de soi-même on trouvera l'espoir. "Espoir", sans doute le mot le plus répété dans cette histoire. Le plus dur étant sans doute d'avoir vraiment foi en quelque chose, et ça, c'est pas forcément gagné...
The Road goes ever on and on,
Out from the door of where it began.
And now far ahead the Road has gone,
Let others follow it who can !
PS : après avoir parcourru quelques forums, je me rends compte que la traduction française pose vraiment problème en effet, comme j'ai pu le lire déjà dans de nombreuses critiques. Et c'est surement à cause de ça que le style de Tolkien nous paraît si difficile à appréhender et c'est bien dommage ! Et je me suis également rendue compte (après quelques recherches) que la traduction comportait beaucoup d'erreurs, parfois graves, et je trouve ça vraiment scandaleux. Je sais que les puristes diront qu'il faut absolument le lire en anglais, mais désolée on n'est pas tous bilingues malheureusement ... J'espère qu'un jour il y aura une retraduction plus digne de l'oeuvre originale. (du coup, je serai curiseuse de voir ce que donne la nouvelle traduction de Bilbo le Hobbit !)