On ouvre le recueil dans la foule de Ciudalia, "caméra à l'épaule", dans les pas d'un membre de la guilde des chuchoteurs en préparation d'un contrat; dague à la ceinture, vêtements élimés pour passer inaperçu, œil aiguisé. Où comment replonger dans le vieux royaume en quelques lignes et redevenir accro. Retrouver ce vieux royaume c'est comme retrouver un vieil ami. On commence par se souvenir de quelques références puis après une dizaine de pages c'est comme si l'on ne s'était pas perdu de vue depuis "Gagner la Guerre".
En cinq nouvelles toutes très différentes dans leur narration et dans leur thème, Jean-Philippe Jaworski entretient la flamme de son univers. On continue d'explorer ce monde que l'on pensait pourtant connaître par cœur après "Janua Vera", avec lequel "Le Sentiment du Fer" possède d'ailleurs bien des similitudes. N'y cherchez pas d'épopées épiques, chacune des nouvelles est courte et sert le propos de sa conclusion.
Si la première nouvelle qui nous conte le contrat d'un chuchoteur fait directement écho à Benvenuto et ses intrigues, les autres possèdent toutes un style propre. On flirte avec la magie pure et dure en compagnie d'une sorcière gardienne de son île, on pouffe avec la plaidoirie du pilleur de cadavre, on suit l’hommage non dissimulé à Tolkien en accompagnant une troupe de nain dans les mines sous la montagne.
Il m'a semblé lire que Jaworski reprendrait le chemin du vieux royaume après sa trilogie celte. Ce recueil ressemble fortement à la piqûre de rappel pour que l’on n’oublie pas ce monde, pour que l'on reste sur nos gardes prêts à embarquer de nouveau.
A lire aussi bien en introduction à l'œuvre de Jaworski pour les nouveaux lecteurs (avec "Janua Vera" mais avant "Gagner la Guerre") que pour reprendre une dose pour les lecteurs en manque: 9/10.