Quand tu en auras marre de lire des bouquins qui te drainent le cerveau,
Des tirades magnifiques qui ne résolvent rien car
Les penseurs s’évertuent et les vers qu’ils n’écrivent pas tuent,
De rabâcher les mêmes mots consensuels et sans substance,
De faire des courbettes à Pierre, Paul ou bien Jacqueline,
De trembler chaque fois que tu regardes par terre,
De travailler juste pour l’argent sale, pour l’argent propre,
De faire silence pour que tout se passe bien,
Décidément ils ne crèveront jamais !
De dire merci pour tout et pour rien,
De raser les murs pour ne pas avoir à te battre,
De couper tes bras et tes jambes pour entrer dans le lit
Qu’on veut te donner mais sur lequel tu gémis,
De sentir ton cœur fondre devant l’injustice et toutes les misères
De mettre ce costume qui te serre et qui ne te plait pas,
De cacher qui tu es vraiment pour ne pas faire de rides,
Pas faire de larmes amères et salées, un océan de tristesse,
Une grève de cailloux battue par des vagues de masques,
De mentir constamment pour que la vérité n'éclate pas alors explose !
Explose seul.e car la déflagration d’une âme ne change rien à la dureté d’un Monde
Où le combat pour du vide et du rien est tout !
Comme une grenade à fragmentation agit sans savoir
Ce qu’elle va briser, ce qu’elle va détruire
Tes lames engendreront aussi des blessures et des larmes.
En attendant creuse un trou bien profond et enfouis toi !
Si tu exploses c’est de la poussière que tu vas soulever, que tu vas projeter.
Elle couvrira les choses, les êtres et tout disparaitra
Dans la grisaille d’un matin de Soleil ou d’un soir de pluie.
L’explosion pourtant parait nécessaire comme une révérence à la magie de la nuit.
Une déflagration vitale qui permettrait aux cerveaux de s’élever,
Aux oiseaux de se révéler et de s’envoler,
Un peu comme un reset, comme un dessinateur efface ses petits croquis infâmes,
Comme un joueur défait son puzzle puis le met au feu déçu par ce qu’il a formé.
Sous les radiations les vers se tortillent.
On sent qu’ils souffrent, qu’ils ont mal,
Et leurs entrailles se déchirent, leurs plexus se serrent
C’est cela qu’il fallait ? Décidément il ne crèveront jamais !
Alors tu t’enfonces dans ton trou, tu le creuses, tu l’aménages.
Mais n’oublie pas de t'enraciner loin des perversions,
De te cultiver patiemment et avec douceur,
De te complaire souvent dans l’ignorance protectrice, l'intuition salvatrice,
De t’imprégner d’illusions factices si propice à l’onirisme,
De nourrir constamment l'insouciance débonnaire de ta jeunesse.
C’est possible mais c’est dur quand on marche mal,
Erodé par les choses, les monstres de la vie.
Pense au présent, respire le sans te laisser faire,
Bouche toi les yeux et les oreilles c'est essentiel,
Evidemment ne parle pas, ne dis rien, branle du chef ça suffira.
Il faut que toutes les souffrances, la superficialité et la bêtise,
Les cris de colère, le brouhaha de la guerre, les abîmes qui tentent de t'avaler
Ne soient qu'un vague brouillard semblable aux volutes d'une cigarette.
Petit à petit la fumée se dissipera, le monde resplendira.
Et tu toucheras quelque chose qui ne s'achète pas, qui ne se vend pas.
Bien caché là bas, tout au fond dans le sein de la mère,
Elle te protègera toujours du fracas, du tonnerre, des éclairs.
Tu seras roi tu seras reine et je te regarderai avec les yeux de la bonté
Et l'envie de te dire que je ne savais pas,
Que je ne me doutais pas qu'on pouvait souffrir si fort
Si facilement par incompréhension et incomplétude.
Je ne pensais pas que les pressions extérieures
Pouvaient à ce point te malmener, te déchirer,
Je pensais ton bouclier beaucoup plus épais
Protégeant ton esprit et surtout ce qui nous définit.
Je ne le comprendrai jamais ni personne car on ne le vit pas.
Je suis passé par là pourtant, mêmes rêves, d’autres envies futiles ou essentielles.
Le temps a fait son œuvre, le temps et la vie et surtout
Elles et ils n'ont pas compris qui comme moi ont oublié mais ne se réveilleront jamais.
Ce soir j’ouvre les yeux calmement, un peu effaré comme au sortir d’un long sommeil
Nous rentrâmes bien tard du centre ville et
Sur le bitume le plus noir, le plus dur, le plus austère,
Tu la vis qui poussait comme un mirage dans une bière.