Après avoir lu, le beau roman "poupées de bambou" publié en 1963, me voici remontant un peu le temps dans la bibliographie de Mizukami jusqu'à 1961 pour y trouver ce "temple des oies sauvages".

L'action du livre se déroule dans le milieu monacal des temples de Kyoto dont on comprend qu'ils sont liés entre eux à travers des accords d'entraide ou de coopération ou encore suivant une ligne philosophique. D'ailleurs, l'auteur (le traducteur ?) emploie à plusieurs reprises le mot "secte" sous-entendant une diversité de pensée entre les différents temples ou plutôt entre les différentes associations de temples.

Mais le sujet n'est pas tellement là. Mizukami nous décrit un monde très fermé où l'accès à la position de moine nécessite un long apprentissage dès le plus jeune âge et surtout le passage par un état de serviteur totalement soumis au moine de qui il dépend.

Le roman serait en partie autobiographique dans la mesure où Mizukami lui-même a été dans la situation du novice Jinen jusqu'à ce qu'il décide d'abandonner la filière monacale en raison de l'existence difficile et ingrate au sein du monastère.

Mizukami nous plonge dans la vie d'un monastère confinant au huis-clos entre Jikai, le moine, Satoko, son épouse et le novice Jinen. Bien plus que cela, il nous dévoile certaines mœurs japonaises où Satoko, maîtresse d'un peintre mourant résidant au temple, est "transmise" à Jikai par lui sans qu'elle n'ait rien à dire. Elle tombe d'ailleurs plutôt bien puisque Jikai, un tantinet libertin pour ne pas dire lubrique, lui révèle sa féminité et développe sa libido, ce que le vieux peintre n'avait, semble-t-il, pas été capable de faire à part de peindre ces fresques d'oies sauvages … Face à ce couple, Jinen, le novice, assiste régulièrement aux ébats pas toujours discrets jusqu'à tomber amoureux de Satoko. Mais Jinen est un être traumatisé par le comportement de sa mère qui l'a abandonné à cet état de semi-esclave d'apprenti, complexé par son physique peu avenant et troublé par certains gestes maladroits de Satoko. Il va développer en lui-même, dans cette atmosphère trouble et malsaine, un sentiment de révolte, mélange intime de jalousie, de haine, de frustration et de soumission.

L'auteur ménage ainsi une montée de la tension dans ce huis-clos, sous le regard de ces oies sauvages, jusqu'à une délivrance soigneusement et lentement méditée, mûrie, puis mise en œuvre. Au fait, est-ce une délivrance ou une vengeance ?


JeanG55
8
Écrit par

Créée

le 25 janv. 2025

Critique lue 16 fois

5 j'aime

2 commentaires

JeanG55

Écrit par

Critique lue 16 fois

5
2

D'autres avis sur Le Temple des oies sauvages

Le Temple des oies sauvages
JeanG55
8

Le temple des oies sauvages

Après avoir lu, le beau roman "poupées de bambou" publié en 1963, me voici remontant un peu le temps dans la bibliographie de Mizukami jusqu'à 1961 pour y trouver ce "temple des oies...

le 25 janv. 2025

5 j'aime

2

Le Temple des oies sauvages
SolsticeH
7

Oiseau de malheur.

Le temple des oies sauvages, près de Kyoto, doit son nom aux superbes fresques réalisées par Nangaku Kishimoto. Juste avant de rendre son dernier souffle, l'artiste confie sa jeune maitresse Satoko...

le 26 sept. 2017

1 j'aime

Le Temple des oies sauvages
Whale
6

Critique de Le Temple des oies sauvages par Whale

"Le temple des oies sauvages" est un roman à huis clos, qui se déroule au temple de Kohôan, à proximité de Kyoto. Ce temple, dit "des oies sauvages", est appelé ainsi en raison d'une fresque peinte...

le 25 juin 2023

Du même critique

L'Aventure de Mme Muir
JeanG55
10

The Ghost and Mrs Muir

Au départ de cette aventure, il y a un roman écrit par la romancière R.A. Dick en 1945 "le Fantôme et Mrs Muir". Peu après, Mankiewicz s'empare du sujet pour en faire un film. Le film reste très...

le 23 avr. 2022

26 j'aime

9

Le Désert des Tartares
JeanG55
9

La vanité de l'attente de l'orage

C'est vers l'âge de vingt ans que j'ai lu ce livre. Pas par hasard, je me souviens très bien qu'un copain me l'avait recommandé. J'avais bien aimé. Cependant, je n'ai jamais éprouvé le besoin de le...

le 7 avr. 2023

25 j'aime

33

125, rue Montmartre
JeanG55
8

Quel cirque !

1959 c'est l'année de "125 rue Montmartre" de Grangier mais aussi des "400 coups" du sieur Truffaut qui dégoisait tant et plus sur le cinéma à la Grangier dans les "Cahiers". En attendant, quelques...

le 13 nov. 2021

25 j'aime

5