Le Temps retrouvé par Scarlett
Il m'est impossible de rédiger une vraie critique/analyse de ce dernier tome de La Recherche du temps perdu, bien trop dense, trop riche, trop complexe. N'empêche qu'après trois années de lecture, j'ai terminé le chef d'oeuvre de Marcel Proust, et que j'ai envie d'en dire deux mots.
Le Narrateur, quand il était plus jeune, voulait être écrivain. Mais sa paresse intellectuelle prend le dessus et il se contente de végéter entre des maisons de repos et des soirées chez la Duchesse de Guermantes.
Mais ce soir-là, alors qu'il se rend justement à une petite sauterie, une série d'événements lui procure la même sensation que la madeleine trempée dans une infusion, vous savez cette sensation étrange qui nous balance nos souvenirs par vagues alors qu'on a juste respiré une certaine odeur ou entendu un certain morceau de musique... Et cette fois-ci, le narrateur s'attache à cette sensation et comprend que c'est grâce à elle qu'il pourra devenir écrivain.
Il nous parle alors, entre quelques considérations sur la mort et la vieillesse, sa mort et sa vieillesse, du livre qu'il va écrire. Et là on a une délicieuse et étrange mise en abîme parce qu'il semblerait que c'est ce livre qu'on est en train de lire... Et pourtant il nous dit que pour décrire un personnage par exemple, il utilisera les traits d'une personne, les manies d'une autre... alors finalement, tout ce qu'on a lu, était-ce vrai ?
Il dit aussi que son lecteur lira en lui-même quand il lira le livre, et c'est exactement la sensation que j'ai eue : Proust décrit à la perfection les sensations, les émotions, les vices que nous connaissons. Il parle de Saint-Loup et on reconnait un ami, il parle d'amour et on se reconnait.
Enfin, Proust déclare qu'il parlera de son oeuvre essentiellement des hommes. Car il est passionné par la place qu'ils occupent, non pas dans l'espace car cette place est extrêmement restreinte, mais dans le Temps : quel prodige fait qu'une personne est capable d'être en même temps un adulte mûr déjà sur un trottoir de Paris et ce jeune homme qui trébuche sur les dales d'une rue de Venise, des années auparavant, par la seule force du souvenir ?
Dans Little Miss Sunshine, l'oncle suicidaire parle de Proust : "un vrai looser : il a passé sa vie à écrire un livre que personne ne lit". Il faut que ça change !!! Je conseille à tous ce livre magnifique, ne vous laissez pas impressionner par les soi-disant "longues phrases", c'est une rumeur infondée, ni par le perpetuel "ah ça c'est un classique qui m'est tombé des mains", la personne qui vous a dit ça n'a rien compris. Prenez le temps, posez-vous et entrez dans la cathédrale du Temps.
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