En 1946, Amerigo, huit ans, vit misérablement avec sa mère Antonietta dans un des quartiers les plus populaires de Naples. Sur une initiative du Parti Communiste, et comme des milliers d’autres enfants du Sud de l’Italie, il est envoyé pour quelques mois dans une famille du Nord de la péninsule, où il découvre un tout autre mode de vie, plein d’appréciables avantages malgré la séparation et le dépaysement. Après une telle expérience, le garçon se retrouve d’autant plus déchiré entre son amour pour sa mère et son attachement à sa famille d’adoption, qu’il vient soudain d’entrevoir à Modène un avenir bien différent de celui qui l’attend à Naples…
S’inspirant d’un épisode de l’après-guerre en Italie, l’auteur s’est glissée par l’imagination dans la tête et le coeur d’un de ces enfants transplantés du jour au lendemain des rues pouilleuses de Naples, où pieds nus et le ventre vide, ils vivaient de mille expédients, à l’aisance confortable d’une famille du Nord, où même la langue est différente, et où l’avenir passe par l’école. Après les angoisses de l’inconnu, le choc du dépaysement et le déchirement de la séparation, l’acclimatation se fait assez avantageusement lorsqu’elle ne prend pas trop le goût amer de la charité. Mais, dès lors, c’est le chemin inverse qu’il faut parcourir six mois plus tard, lorsque sonne l’heure d’un retour parfois cruel à une réalité dont ils perçoivent désormais l'aspect sordide et l’absence d’avenir.
Rédigé à hauteur d’enfant, puis avec la mélancolie d’un homme mûr se retournant sur son parcours, le récit choisit de nous embarquer dans une histoire faite de déchirement et de culpabilité, où, pour grandir, le personnage principal se voit contraint de « troquer ses désirs contre tout ce qu’il a », avec le sentiment de trahir les siens dans ses efforts pour devenir autre. En mettant l’accent sur la dualité d’Amerigo et sur sa relation d’amour manqué avec sa mère, la narration se fait poignante sur tout le dernier quart du roman. Mais servie avec générosité, l’émotion ne suffit pas à masquer la vague sensation de creux de cette dernière partie, peu consistante quant à la personnalité et à la vie d’Amerigo adulte, mais aussi assez peu crédible quant à sa tendre pirouette finale.
Un tant soit peu trop romanesque et sentimentale sur un sujet historique intéressant qui aurait mérité un traitement plus approfondi, cette jolie histoire tendre, fluide et sans temps mort, reste une lecture agréable et facile qui ne manquera pas de faire couler bien des larmes.
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