Emue lors d’un concert par le timbre très particulier d’un violon, l’auteur passionnée par les arts et l’Italie s’est mise en tête de retracer la vie de l’instrument, certes jugé sans valeur par les experts, mais dans son imagination le précieux réceptacle des émotions qui, d’un siècle à l’autre, ont pittoresquement accompagné son passage de main en main de musiciens.
De Crémone, la ville berceau de la lutherie abritant encore aujourd’hui plus de cent cinquante ateliers, au marché de Rostov-sur-le-Don dans le sud de la Russie où le violon fut acheté à un certain Lev, en passant par les forêts des Dolomites où se récolte toujours le précieux épicéa rouge, bois de prédilection des Stradivarius, Helena Attlee a passé quatre ans sur les traces de l’instrument, se le représentant d’abord violon d’église, possiblement joué aux côtés de Corelli dans l’un de ces orchestres si à la mode lors des offices religieux de l’Italie du XVIIe siècle ou par l’une de ces petites filles placées dans les ospedali de Venise, les plus vieilles écoles de musique d’Europe où officia notamment Vivaldi. Il aurait pu aussi devenir violon de cour, comme ceux dont les Médicis usèrent pour éblouir sujets et rivaux de leur « magnificenza », ou plus simplement violon tsigane ou instrument de « musica popolare », cette musique folklorique qui fit si longtemps fureur en Italie.
Et puis, après ce tour d’Europe et cette balade au travers des siècles retraçant avec passion l’histoire du violon en général, c’est une expertise dendrochronologique de l’instrument en train de rendre l’âme, à bout de réparations après une vie livrée à nos suppositions, qui permet au final de découvrir précisément son origine tant fantasmée. Ainsi s’achève un périple, sans doute trop survolé pour passionner les spécialistes, mais riche de pittoresques découvertes pour les néophytes que ce panorama historique a d’autant plus de chances de séduire que sa narration très vivante chatouille imagination et curiosité quant au véritable parcours du violon de Lev, en même temps qu’elle se charge de l’émotion portée par ces objets que l’on investit d’une forte valeur sentimentale.
Alors, non, le violon de Lev n’était pas l’un de ces « vieux italiens » dont la cote atteint des sommets sur les marchés financiers et que l’on s’évertue depuis des lustres à copier à ne parfois plus savoir démêler le vrai du faux. Mais, nourrie des émotions des musiciens dont il a partagé la vie, sa voix n’en porte pas moins les échos de siècles enfuis, auxquels l’on prête bien volontiers l’oreille dans cette non-fiction soignée et captivante.
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