La vie peut être belle, et de façon inattendue : voilà qu'on retrouve un texte inédit de Stefan Zweig, et tout permet alors de croire - au moins quelques instants fugaces - aux miracles. Peut-être un jour, le destin ressortira-t-il ainsi de son chapeau un album inconnu de Tintin par Hergé ? Bon, soyons réalistes, voici une petite centaine de pages seulement d'une nouvelle qui n'a pas, quoi qu'en dise la préface, la beauté irradiante des grands textes de Zweig. Non, mais quand même... Car tout est bien là, au point qu'il peut être délicat de retenir nos larmes en tournant ces pages : le style incroyablement riche, la précision de la description de chaque mouvement - du corps comme de l'âme, mais surtout du coeur -, les bouffées asphyxiantes de passion et de désespoir qui nous envahissent par alternance. Et si la fin, curieusement suspendue (ou peut-être n'ai-je rien compris ?) prive finalement ce beau texte d'une apothéose qu'il aurait méritée, on a le droit de lire dans cet inachèvement une générosité possible de l'auteur envers ses personnages privés de leur histoire d'amour par le destin et l'Histoire. Alors, au final, un texte moins "essentiel" de Zweig reste un plaisir plus riche et marquant que bien des "chefs d'oeuvre" soi-disant modernes. [Critique écrite en 2009]