Le Voyant d'Étampes est le second roman d'Abel Quentin, de son vrai nom Albéric de Gayardon, après Sœur (2019). Publié en 2021 il reçoit le prix de Flore et le prix Choucri-Cardahi et rencontre un certain succès.
Jean Roscoff, né dans les années 1950 est un professeur d'histoire à l'université à la retraite. Militant SOS racisme dans sa jeunesse, il publie un premier ouvrage sur l'affaire des époux Rosenberg. Défendus à l'époque par des intellectuels tels que Sartre, le sujet passionne les foules. Manque de bol, la thèse de leur innocence sera démentie juste après la sortie du livre. La honte pour Roscoff. L'heure de la retraite étant venue, il décide de publier un second livre, cette fois sur un poète états-unien communiste, Robert Willow, ayant écrit d'abord en anglais, puis en français lors de son installation en France. Seulement, Robert Willow était "noir", et Roscoff fait l'erreur d'à peine le mentionner : une cabale se déchaine alors sur lui.
Le personnage de Roscoff, professeur d'université dépressif, a tout du héros houellebecquien, il rappelle fortement François, le professeur de littérature spécialiste de Huysmans dans Soumission, mais cela ne s'arrête pas là. Le style même d'Abel Quentin est tellement proche de celui de Houellebecq qu'on dirait parfois une (plutôt bonne) imitation. Le livre explore les conséquences d'un antiracisme devenu à son tour raciste, dans un mouvement dialectique très hégélien et se déchainant sur un individu. Par l'absurdité des situations décrites, le livre rappelle souvent La conjuration des imbéciles, mais sans en atteindre malheureusement le niveau. Si l'idée était intéressante, on a compris l'idée assez rapidement et le livre commence à beaucoup se répéter à partir du milieu et à en devenir légèrement ennuyeux sur la fin. Dommage, car l'auteur a des capacités certaines et on lira tout de même son prochain livre avec curiosité et je l'espère, plaisir.