Ivan Bounine cite plusieurs fois Guy de Maupassant dans ses nouvelles des Allées Sombres. Cela n’est sans doute pas anodin, tant ses histoires se rapprochent de celles de l’auteur français. En effet, outre une beauté d’écriture s’accordant à des sujets triviaux voire sordides, Bounine a, à l’instar de Maupassant, un don pour résumer la vie tragique de ses personnages en à peine quelques pages.
Bien sûr, il serait injuste de limiter Bounine à un simple clone. Russe d’origine, il a dû très vite fuir son pays natal au cours des années 20 pour échapper au régime communiste. S’ensuit de ses descriptions des paysages russes une profonde mélancolie, semblable à celle d’un vieil homme se souvenant des lieux qu’il fréquentait dans sa tendre jeunesse. D’histoire en histoire, on passe donc des grandes métropoles russes (Moscou et Saint-Pétersbourg) aux terres sauvages de l’Oural en passant par les grandes maisons de campagne si chères au peuple russe, les datcha.
Cette mélancolie mémorielle se voit couplée à une narration tragique, épousant parfaitement le thème commun de ces nouvelles : des histoires d’amour ou de passion désespérées. Il ressort de tout cela un fatalisme ambiant, parfois proche du cynisme.
Evidemment, toutes ces histoires se déroulent à une époque antérieure à la Révolution russe, période bénie pour Bounine où les us et coutumes de la haute société tsariste étaient aussi distingués et précieux que son écriture. Encore une fois, la nostalgie est de mise…
On se perd dans ces Allées Sombres empreintes de grâce et de détresse…