Les Cendres du temps
Les Belles Endormies semble se baser sur un principe paraissant être une contradiction, du moins dans le monde occidental, avec ce qui pourrait s’apparenter à des prostituées (payer pour passer une...
le 17 août 2020
17 j'aime
6
Voilà le genre de roman d'où je sors avec un sentiment d'irréalité qui colle durablement à l'âme !
Roman du mystère et d'une certaine forme de fantasmagorie, "Les Belles Endormies" narre comment Eguchi, 67 ans, se rend sur les conseils d'un ami dans une maison secrète, où dans une chambre secrète est profondément endormie une jeune fille à l'identité secrète. En effet, dans cette maison pleine de mystère où l'on entend bruisser le feuillage des arbres et mugir le vent et les vagues contre la falaise, des jeunes femmes et des adolescentes sont intentionnellement droguées et profondément endormies par une mère-maquerelle dans le but de permettre à des vieillards impuissants de dormir auprès d'elles. S'ils ne peuvent les pénétrer, les caresses, les fantasmes ou un simple repos dans la contemplation de la jeunesse sont permis à ces hommes séniles que guette la mort. Au fil de ces nuits sous ce toit étrange, Eguchi, moins décrépi que les autres habitués des "Belles Endormies", voit évoluer ses sensations et ses émotions. Les filles dont il rejoint la couche dans la chambre secrète tendue d'écarlate sont belles, très jeunes, inaccessibles à la conscience, vulnérables et soumises. Pour Eguchi, les côtoyer est d'abord l'occasion de se sentir reverdir au contact charmant de la prime jeunesse féminine, puis l'opportunité de s'évader vers des réminiscences oniriques qui le confrontent à ses rapports aux femmes tout au long de son existence.
Là où la réalisatrice Julia Leigh a vu et mis en scène dans son film "Sleeping Beauty" une lecture contemporaine et japonaise du conte "La Belle au Bois-Dormant", je n'ai vu quant à moi qu'une façon poétique d'aborder les thèmes de la vieillesse et de la mort auxquels se rattachent les notions de remord, de regret, d'illusion, de domination, de rêve et d'espérance. J'ai d'abord été touchée par la poésie de ce scénario improbable - impossible ? - puis j'ai été heureuse que le roman soit court car un malaise, né de ma propre féminité, a commencé à naître en moi. Je dis bien malaise et non trouble car à aucun moment je ne me suis sentie émue ou concernée par la volupté inhérente à ce récit.
Eguchi utilise ses cinq sens pour admirer les "Belles Endormies" et les descriptions de l'auteur sont vraiment très belles, sensuelles et érotiques sans être dégradantes mais j'en suis venue, à la fin de ma lecture, à la conclusion qu'il faut peut-être - sans doute ? - être un homme pour pleinement comprendre - et apprécier ? - la densité d'un tel roman. Reste l'écriture qui est remarquable ; elle sert à merveille l'irréalité du récit et transmet tour à tour au lecteur sa pesanteur ou sa légèreté, avec talent.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Challenge XXème siècle (sans limite de temps), Challenge Nobel (sans limite de temps), 2019, Challenge MULTI-DEFIS 2019 et Challenge 1914-1989 - Edition 2019
Créée
le 5 sept. 2019
Critique lue 348 fois
4 j'aime
D'autres avis sur Les Belles Endormies
Les Belles Endormies semble se baser sur un principe paraissant être une contradiction, du moins dans le monde occidental, avec ce qui pourrait s’apparenter à des prostituées (payer pour passer une...
le 17 août 2020
17 j'aime
6
Dans ce court roman (128 pages) qui date de 1961, Yasunari Kawabata (prix Nobel de littérature 1968) imagine une maison close assez particulière, qui lui permet d’alimenter une réflexion sur les...
Par
le 3 févr. 2021
16 j'aime
8
Le vieil Egushi, soixante-sept ans, pénètre pour la première fois dans un établissement un peu particulier. Moyennant finance, on permet à de vieux messieurs (des clients de tout repos) de s’endormir...
Par
le 29 nov. 2013
12 j'aime
8
Du même critique
Comme je déteste interrompre une lecture avant le dénouement, c'est forcément un peu avec la mort dans l'âme que j'abandonne celle de "La Horde du Contrevent" à la page 491 (sur 701). Pourquoi...
Par
le 1 janv. 2014
68 j'aime
24
Je viens d'achever la lecture de ce petit livre qu'on me décrivait comme l'un des dix livres de science-fiction à lire dans sa vie sous peine de mourir idiot. Je viens d'achever la lecture de ce...
Par
le 15 sept. 2013
55 j'aime
10
Jusqu'à présent, de Joël Dicker, je ne connaissais rien ou plutôt pas grand chose, c'est-à-dire le nom de son premier roman "La vérité sur l'affaire Harry Quebert". Depuis cette parution...
Par
le 22 mai 2018
33 j'aime
8