Il faut bien le dire, les premières pages ne donnent pas spécialement envie de s’engouffrer dans le roman. Quand j'ai commencé ma lecture, je me suis sérieusement demandé comment l'histoire d'un anticlérical antipathique qui fait des expérience sur des rats pourrait devenir intéressante... Mais j'ai bien fait de persévérer parce qu'on quitte rapidement Anthime Armand-Dubois (Gide a vraiment l'art des noms saugrenus, c'est un des charmes de sa patte) pour s'intéresser a un réseau de personnages tous un peu frappés mais très attachants! Chaque livre est consacré a un personnage différent, personnages qui au début ne semblent pas avoir de liens entre eux. Pourtant, à mesure que le récit avance Gide se débrouille pour les faire se croiser un peu dans tous les sens et c'est toujours chouette de voir resurgir dans un contexte tout à fait différent un personnage qu'on avait presque oublié.

Passé les premières pages, on est vite pris par cette histoire saugrenue qui interroge le rapport à la vérité: a force de voir les personnages persuadés que le pape a été enlevé, on fini par y croire tout en sachant que c'est faux, mais en même temps, que le pape soit le vrai ou un suppôt du Quirinal, on se demande un peu si ça change vraiment grand chose...Par contre cette fausse information suffit a Anthime pour remettre en cause une foi récemment acquise comme s'il apprenait finalement que c'est le Dieu qu'il vénère qui est faux.

En questionnant notre rapport au vrai, Gide questionne surtout notre rapport à la réalité, car c'est autours de ce qu'on pense être la vérité qu'on se construit, et lorsque Amédée Fleurissoir ne parvient plus a démêler le vrai du faux il en devient complètement paranoïaque. Il aurait pourtant pu continuer sa petite vie tranquille car les événements pour lesquels il se passionne se tiennent très loin de lui et de ce qui le concerne. De l'autre côté, le jeune Lafcadio commet son crime sans motif car rien de concret ne l'attache au réel, il accorde à ses actes aussi peu de conséquences que dans rêve. La fin du livre nous laisse supposer que c'est par l'amour qu'il va commencer a vivre réellement. Et c'est surement parce qu'on quitte l'inconséquence que le récit prend fin.

Je n'ai pas trouvé Les caves du vatican aussi bien que Les faux-monnayeurs, roman que j'ai vraiment adoré, mais ça reste un livre très chouette avec pas mal de chose à se mettre sous la dent, et ce dans la durée.
Aude_Elem
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le 2 sept. 2013

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Aude Elem

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