Je ne savais pas du tout à quoi m'attendre en commençant ma lecture chronologique de l’œuvre de Balzac (ma liste, pour ceux que ça intéresse: https://www.senscritique.com/liste/La_Comedie_humaine_Chronologie_d_ecriture/2596504 ). Les Chouans... un roman qui ne semble pas particulièrement apprécié. L'auteur lui-même le qualifia de croûte de jeunesse. Et puis, que m'évoque cet auteur, après tout ? Souvenirs scolaires de longs passages descriptifs qui aspirent l'âme du lecteur en même temps que son énergie vitale... Brr, dans quelle galère me suis-je engagé ?
Une galère ? Une excellente surprise, finalement. Les descriptions qui m'effrayaient se présentent ici sous un jour favorable, teinté de romantisme voire même de gothisme. Il faut lire l'arrivée au château de Montauran ou les pérégrinations de l'héroïne dans l'obscurité d'une nuit funeste pour mieux comprendre l'étonnant éclectisme dont est capable l'auteur.
Fougue de jeunesse, sans aucun doute, mais Balzac parvient à osciller sans jamais se perdre entre drame historique, tragédie, roman d'espionnage, histoire d'amour, récit de guerre... Les thématiques s'interpénètrent, se renforcent, soutenues par des dialogues souvent vifs et cinglants. On peut tout de même reprocher à ce roman ses deux héros aux caractères trop versatiles pour être crédibles. Aimer quelqu'un à la folie et le haïr et puis l'aimer à nouveau le lendemain pour vouloir sa mort avant de l'aimer vraiment vraiment promis juré cette fois, bon... On se consolera dès lors avec une savoureuse galerie de seconds couteaux à la psychologie retorse et souvent capables d'une grande violence.
Premier opus étonnant, Les Chouans est une lecture agréable, d'une grande richesse, qui aurait juste gagnée à être raccourcie d'une centaine de pages. Si l'on m'avait proposé d'étudier ce livre à l'école, il est à parier que je me serais intéressé bien plus tôt à la littérature française classique.