Dans un sens, il est très intéressant et instructif de se plonger dans les textes originaux des contes de fée qui ont bercé notre enfance, mais attention aux désillusions. Loin des variantes édulcorées de Disney (sur lesquelles personnellement on ne me verra jamais cracher car elles m'ont divertie enfant et continuent bien souvent à le faire, adulte), ce recueil possède la saveur de l'authenticité, avec ce que cela comporte de désuétude et de morale.
Le Petit Chaperon Rouge, Riquet à la Houpe, la Belle au Bois Dormant, Cendrillon et la pantoufle de verre, la Barbe Bleue, le Chat Botté, le Petit Poucet, Peau d'Ane, et bien d'autres se retrouvent dans cette édition des "Contes de ma mère l'Oye" de Charles Perrault. Où l'on découvre, comme chez les frères Grimm, beaucoup de noirceur et de violence, mais aussi beaucoup de justice et de fortune. Alors, certes, ce n'est pas certain que les enfants les apprécieraient aujourd'hui tant ils sont protégés mais fut un temps pas si lointain où petits et grands craignaient "pour de vrai " le Grand Méchant Loup, la Mauvaise Fée et l'Ogre dévoreur d'enfants et c'est sans doute d'ailleurs pour cela que ces fables plus ou moins féeriques ont traversé le temps et les mémoires, parce qu'elles les ont marqués d'un sceau indélébile.
Les contes avaient donc pour eux de montrer ou de rappeler, de manière à être compris de tous, pauvres ou riches, misérables ou lettrés, les frontières du bien et du mal, de la justice et de l'injustice. Leur valeur éducative primait même sur leur valeur narrative ; certains sont assez expéditifs, presque aussi courts que des fables ou des poèmes, mais ils constituent la première littérature de l'imaginaire, en marge des légendes et des mythes, mettant en scène des paysans, des princes, des marchands, des animaux domestiques, bref, tous ceux à qui il est si facile de s'identifier.
J'ai été particulièrement touchée par "La marquise de Salusses ou la patience de Grisélidis", conte long et moins connu, très poétique. Il m'a d'ailleurs contrainte à vérifier les dates de Charles Perrault tant j'ai eu l'impression que cette histoire de bergère qui épouse un roi avait été écrite pour Marie-Antoinette, mais cela n'était qu'une illusion (ou une prescience ?) puisqu'il fut édité plus de soixante ans avant la naissance de la future reine de France.