"Au secours ! On assassine des hommes !"
A la fois fiction et autobiographie, c’est par petites ou grandes saynètes que Roland Dorgelès nous livre un fort, touchant et réaliste récit sur la Première Guerre Mondiale. Sans début, sans fin et sans se vouloir exhaustif, le récit nous guide à travers les saisons, à travers les mois, dans les rainures boueuses des tranchées du nord de la France avec un style magnifique, clair, très riche en figures de style. L’immersion est renforcé par des dialogues en argot lointain qui rythment la narration, tout en gouaille du début du siècle dernier. On entend presque les accents de chacun, pendus à des bacchantes bouclées…
On y est, dans l’interminable attente du froid mordant, dans les nuits boueuses grouillantes de rats, au milieu des bombardements apocalyptiques, dans l’horreur absolue du champs de bataille étourdi d’obus et grêlé par la chair, le râle sordide des blessés et l’omniprésence de la mort… L’enfer glaçant de 14-18 contrasté par les changements de saisons, le quotidien des corvées, les permissions "à l'arrière" et la camaraderie d’une jeune escouade qui espère rester en vie, tout en prenant le temps de rire…
Un livre indispensable pour la mémoire des morts et pour les survivants qui en sont revenus. Un livre pour ne jamais oublier ces pauvres soldats dont l'existence a été gâché pour l’absurdité de la propriété et un état d’esprit de revanche. Une moyenne d’âge de vingt ans pour toujours symbolisée par ces nombreux parterres de croix de bois.
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