"Les Dames de nage" est le premier ouvrage de Bernard Gireaudeau qu'il m'ait été donné de lire. J'ai acheté ce livre dans une très belle édition, en format de poche et j'en suis vraiment très fière. Je trouve l'écriture de Gireaudeau extrêmement puissante, en partie grâce à l'équilibre subtil entre une certaine brutalité de l'écriture (qui est parfois même assez crue) et un aspect très poétique de celle-ci. Toujours à la frontière entre ces deux partis, il parvient à un rendu vraiment époustouflant.
L'autre charme de l'écriture de Gireaudeau, et que je retrouve en ce moment même en lisant "Cher amour", c'est ce caractère immédiat de l'écriture, un carnet de voyage où se mêlent histoire, poésie, légendes et récits tribaux ou imaginés, la brutalité de la vie, l'horreur de la pauvreté et de l'abandon, l'amour du voyage, de la rencontre avec autrui, cette part d'imaginaire libéré et indomptable que l'auteur nous fait partager au fil des pages de ce magnifique livre. Peut-on dire roman? Oui, sans doute... mais pas tout à fait; ou disons plutôt, tellement plus que cela. A la fois conte, récit de voyage, poème, ode... La richesse des mots, leur caractère évocateur, célèbrent l'Amour, la Femme. Comment ne pas aimer Gireaudeau? Un amour de carte postale, une quête aventureuse, une soif de connaître mais surtout de découvrir. Boire à la source de la vie jusqu'à l'ivresse. Voyageur solitaire, mais citoyen du monde, de quais en quais, des côtes françaises aux sommets des Andes, le narrateur est bouleversé par des personnalités hors du commun, des êtres à la richesse infinie, et nous bouleverse par ce qu'il en apprend, secrets amoureusement cachés et préservés d'un monde qui lentement s'éteint.
Que dire de la Femme? Belle, fière, forte... faible parfois aussi, fragile tout du moins. Héroïne oubliée, amoureuse éperdue mais aussi cruelle et insondable. Aimer, toujours aimer comme si c'était la première fois, aimer jusqu'à oublier, à disparaître.
Je l'ai aimée comme un enfant, comme un homme, comme je n'ai jamais plus aimé.
L'histoire du marin et de Colette Mahina, ou Rarahu comme il se plaît à l'appeler, m'a énormément touchée. Images flottantes de la solitude, de femme-enfant et d'homme-enfant, de destins inexplicablement mêlés et enchevêtrés, de sentiments absents de toute définition, pas tout à fait ceci mais pas totalement cela non plus, parce qu'au fond, ce qui importe c'est d'aimer: amour filial, platonique, passionnel... aimer et puis c'est tout. Prostituées, marins, miniers, jeunes ou vieux, hétéros ou pas, amoureux de la vie ou simple âme errante, vivre, exister, et mourir.