On va pas de mentir, ce roman est bon (surtout pour un 1er roman, celui de l'autrice allemande Hélène Bukowski) mais il m'a laissé sur ma faim.
Mais reprenons du début : ce récit, écrit à la 1ere personne, est le récit de Skalde qui nous raconte tout d'abord sa relation à sa mère Edith ; puis sa relation aux autres habitants de sa communauté lorsqu'elle recueille Meisis, une jeune fille différente car ayant les cheveux roux et surtout parce qu'étrangère dans ce lieu.
Le lieu, on ne sait pas où il se trouve, ni quand. On fini par comprendre qu'il y a eu une catastrophe, que ce territoire est désolé, entre brume, chaleur et sécheresse ; et que ses habitants ont fait le choix de s'isoler encore plus en détruisant le seul pont qui les reliaient à … autre chose, un territoire d'espoir ou une autre terre désolé ?
La force de ce récit est de nous livrer les infos au compte goutte. On déduit plus qu'on ne comprend : la relation entre Skalde et Edith ; la différence d'Edith ; son rapport à la communauté ; l'incompréhension de Skalde sur le regard que porte Eidth sur Meisis ; les relations entre les habitants du territoire et de ce binôme.
On navigue entre le récit fantastique, la dystopie. Les habitants ont peur de l'autre parce qu'il est différent et peut être dangereux. On ne saura jamais vraiment si ils ont raison. Le fond du propos n'est pas là. C'est plutôt dans comment on gère cette incertitude. Comment on fait face à nos doutes et nos questionnement quand il y a une possibilité que l'inconnu détruise notre quotidien, aussi minable et désolé que soit ce quotidien.
Cette thématique m'a vraiment parlé, mais je suis resté déçu de la faible exploitation de celui-ci. Je n'ai rien contre devoir faire travailler mon imaginaire, mais ici, il n'avait pas assez d'ingrédient de base pour déployer la complexité de ce que l'on aperçoit sur Edith, Skalde, leur relation, leur histoire et leur lien avec les autres personnages.
Le roman est très bien écrit cependant, et rien que pour l'atmosphère pesante et la très bonne retranscription de cette atmosphère mi brumeuse mi écrasante de chaleur, la lecture vaut l'effort. Mais j'aurai eu besoin, pour être complètement emporté d'un peu plus de piste sur certains éléments de l'histoire, afin d'en saisir et d'en apprécier les complexités. De même, on perçoit une histoire et un passif important derrière chaque personnage, sans avoir les clés pour comprendre ce relief. Si la narratrice avait été Meisis, on aurait pu penser que c'était pour nous mettre à sa place et dans son incompréhension. Mais c'est Skalde, et on comprend bien qu'elle en sait plus que ce qu'elle nous dit. Dommage, ce monde, ces personnages, cette temporalité, j'aurai eu besoin de mieux les comprendre pour vibrer et percevoir l'enjeu d'attendre que tombe ces dents de laits.