L’histoire imaginée par Antoine Bello questionne avec virtuosité notre rapport avec la vérité, en démontrant – cette fois-ci, exemples « historiques » à l’appui – que l’esprit humain lui préfère la fiction. Comme dans « Les faslificateurs », la démonstration est très didactique, l’écriture de Bello étant toujours animée des mêmes intentions de clarté, mais la vitesse des échanges entre les personnages et la succession – trépidante ! – de rebondissements et révélations font oublier ce didactisme des dialogues et l’efficacité du style. La lecture est une source permanente d’excitation intellectuelle. Le rythme soutenu des péripéties, les ellipses parfois brutales qui accélèrent le récit et font sauter les temps morts, alimentent cette excitation.
Dans sa dernière partie, le roman devient une réflexion très intéressante sur l’importance de la fiction. Le parallèle entre les activités du CFR et la littérature était une évidence depuis le début de la trilogie, mais il est enfin exploité avec sens dans « Les éclaireurs ». Sliv et ses collègues prennent un plaisir fou à écrire leurs fictions et à les rendre réelles, tout en ignorant la finalité de cette activité. La révélation de cette finalité à Sliv et au lecteur est une surprise qui ouvre des nouveaux champs de réflexion, que le romancier explorera dans les derniers chapitres et ceux du dernier tome de la trilogie, « Les producteurs ».
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