Plus que l'aube, le crépuscule
Les Enfants de l'Aube est un roman assez surprenant, surtout quand on le lit jeune. On ne comprend pas tout et on est choqué par certains passages, très crus. Il a l'air de vouloir nous dire la...
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le 22 mars 2016
Les Enfants de l'Aube est un roman assez surprenant, surtout quand on le lit jeune. On ne comprend pas tout et on est choqué par certains passages, très crus. Il a l'air de vouloir nous dire la vérité, sans rien omettre, et pour cause : il prend la forme d'une confession, celle d'un père à son fils, par le biais d'un journal.
Il y a donc un double point de vue : celui du romancier, et celui d'un narrateur qui raconte à travers un récit écrit. Cela a tendance à écraser l'angle selon lequel on apprécie les choses (comme un caméra écraserait un plan), gommant les futilités et les détails pour ne laisser que ce qui compte vraiment : l'amour, la souffrance, l’honnêteté. C'est la raison pour laquelle le "crépuscule" aurait certainement été un bon titre, car évoquant tout autant l'aube que la tombée de la nuit, il désigne ce moment incertain, charnière entre le jour et la nuit, qui offre une luminosité si particulière et une ambiance si unique. Mais surtout, il écrase le soleil sur l'horizon, donnant l'illusion qu'il est grossi, tout comme les moments importants de la vie de Tristan sont ici mis en évidence.
Le roman a également le mérite de nous replonger dans un univers qui ne nous est plus du tout familier, celui des sanatoriums, qui ne sauraient mieux correspondre à un livre qui veut dire l'amour et la mort. Le sanatorium n'est en fait rien d'autre qu'un mouroir où les malades sont en sursis, tandis que les montagnes, la nature dans lesquelles il est construit contiennent la promesse, tout comme l'aube, d'un renouveau, d'une vie malgré la maladie.
L'ouvrage ne prétend pas dresser un patron de l'amour, un tableau du couple tragique qui s'éteint dans sa passion. Même si la focale ne lâche pas Camille et Tristan, on ne peut s'empêcher de se les imaginer sur une grande fresque pastorale, peints en petit dans des tons qui tranchent avec les couleurs naturelles.
Par ailleurs, la mort s'invite et l'amour raconté est exclusif, incapable de surmonter la perte. Le passage de témoin n'a pas de vertu initiatique, mais il n'est pas non plus un aveu d'échec. Tout comme le livre a une limite, le carnet de Tristan en a une, sa vie aussi. Il permet de boucler la diégèse et de faire sens tout en donnant une dimension quelque peu mystique au récit.
Les Enfants de l'aube est un livre très prenant, très bien écrit, et malgré l'aube qu'il promet, qui n'a rien d'un travail inachevé.
Créée
le 22 mars 2016
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