Alors que je suis en pleine redécouverte du théâtre de Molière, l'heure est venue de me frotter à Scapin. Molière est reconnu comme un auteur de génie, mais plus je progresse dans son œuvre plus j'aperçois qu'il s'agit bien moins d'une maîtrise de la langue française que de sa capacité d'entremetteur. Il est, en effet, responsable du mariage entre la comédie et la farce. Et cette-dernière n'est pas là pour élever l'oeuvre mais bien pour la rendre accessible au plus grand nombre.
L'humour de la farce abaisse les Fourberies de Scapin en jouant sur le ridicule des coups de baton, grand classique de la farce. Heureusement, à la différence du Médecin malgré lui, la pièce ne s'est pas centrée sur cet humour de la farce mais sur des phénomènes plus complexes d'humour. Ainsi, les quiproquos, la moquerie et la fourberie de Scapin sont au centre de l'humour.
Un humour qu'on aurait aimé encore plus présent, mais la complexité de la situation finale oblige Molière à abréger et à chercher à résoudre la situation plutôt que d'en rire davantage. Il faut dire que cela suit de l'énorme complexité de la pièce que Molière a tenté d'écrire. Tenté car 3 actes paraissent bien peu pour une telle histoire. Deux fils veulent se marier à deux femmes et leurs deux pères cherchent à s'y opposer, on découvre à la fin que chacune des femmes est la fille du père de l'autre. Entre temps, chacun des pères va chercher à s'opposer au mariage et chacun des fils va tenter d'escorte de l'argent à leurs pères. Au milieu de chaque étape se trouve Scapin qui va essayer, par amour du jeu, d'user de ses fourberies pour que les jeunes gens y trouvent leurs comptes.
L'humour est donc au rendez-vous, notamment avec le personnage principal, Scapin, qui plus que valet joue le rôle de meneur. Il contrôle toutes les situations. Il se rit de toute le monde et a à chaque fois une solution. Mais il ne le fait pas par égo, mais par goût du jeu. Malgré tout, il agit encore parfois comme un valet et n'a pas encore la force et la volonté d'un leader. Ce goût du bon mot, de la maîtrise de toute situation se retrouve dans beaucoup de pièce de Molière et si Scapin est bien maîtrisé on ne peut que se dire que Molière manie si bien ce type de personnage qu'on aurait aimé une mise en avant plus grande, encore, du personnage.
Il faut dire que l'histoire des deux familles est si complexe qu'elle aurait pu être simplifiée pour se centrer sur des fourberies différentes et non sur les mêmes qui apparaissent comme bien simplistes. De plus Scapin est vu par les pères comme un méchant alors qu'il ne fait que servir bien gentiment les jeunes hommes.
En sommes, l'histoire souffre de se concentrer sur l'histoire d'amour et de ne pas être un simple prétexte pour se concentrer sur Scapin. Le goût de la farce rend une des scènes principales de Scapin comme étant du pure comique bête et méchant sans grand intérêt. L'usage de la langue de Scapin, bien belle chez lui, souffre aussi de ne pas avoir de répondant digne de lui.
N'allons pas croire que la pièce n'est pas agréable. On s'amuse et on rit. On rentre rapidement dedans. De plus, on oubliera pas l'aspect novateur de fusionner farce et comédie. Molière est un créateur novateur dans le type même dans lequel il œuvre. Mais ,malgré sa beauté et ses belles idées, Scapin souffre d'être un joyaux au milieu d'une pièce qui ne le mérite peut être pas assez.