L’exercice est compliqué, de combler de manière intelligente les vides laissés entre des informations documentaires. Au début, un léger prêt à penser bienveillant montre les hésitations de l’autrice, on se laisse progressivement emporter. L’écriture gagne en corps, la fiction fonctionne. Il reste dans le texte une sensiblerie parfois dérangeante mais Claude, son effronterie et sa finesse font de cette lecture une belle rencontre.
Suzanne Malherbe et Claude Cahun, couple de lesbiennes françaises surréalistes vivent en exil à Jersey quand la seconde guerre mondiale éclate et que l’île est declare. L’île est rapidement envahie et un long siège de 4 ans viens miner progressivement le moral des jersiais, de contraintes, en privations, aux nouvelles des déportations et aux humains décharnés des camps de travail qui s’installent sur l’île.
La joie s’éteint plus la guerre s’installe et Claude et Suzanne alors cinquantenaires rêvent de liberté, d’individus libres en pensée et fomentent le plan malicieux qui leur permettra de tenir malgré leurs corps fatigués.
Cette histoire vraie, l’histoire de deux lesbiennes malicieuses à la santé fragile, peint en parallèle la dureté des conditions de vie sur l’île et le combat clandestin du couple. Le soldat sans nom, soldat allemand dissident et facétieux, construit de toute pièce par Claude, va semer pendant 4 ans le doute parmi l’armée allemande en laissant des tracts un peu partout dans l’île et dans les véhicules, colis, vestes et sacs des envahisseurs. L’armée aura passé 4 ans à enquêter sur ce soldat inconnu sans se douter que c’était 2 bourgeoises françaises isolées. Elles seront finalement débusquées à la fin de la guerre et graciée pour éviter un scandale. Elles sortiront indemnes de la guerre et de leurs farces. L’île de Jersey sera d’ailleurs libérée par les allemands qui se retireront sans la moindre effusion de sang.