Dans l’armée américaine depuis quatorze ans, Mick Hardin revient dans son Kentucky natal où il a laissé sa femme, Peggy. Cela se passe dans un coin relativement isolé dans les collines, d’où le titre. Régulièrement absent, loin de sa famille, Mick travaille comme enquêteur (basé en Europe semble-t-il) où on l’appelle lorsqu’un cas se présente. C'est donc un habitué des techniques d’interrogatoires et il a une bonne capacité également pour sentir s’il peut se fier ou non à ce qu’une personne en face de lui raconte.
En pleine forêt, Mick découvre le cadavre d’une jeune femme du coin. Coïncidence, Linda sœur de Mick, vient d’être nommée shériff du patelin. Or, Linda sait pertinemment que pour Les gens des collines, voir une femme enquêter ne passe pas vraiment, ce qui veut dire qu’elle aura du mal à obtenir les témoignages et les informations qui lui permettraient de faire avancer l’enquête. C’est pourquoi, elle demande à Mick de mener des investigations pour son compte. Nous voilà donc avec un enquêteur aguerri, mais non assermenté, qui mène des investigations en sous-main pour sa sœur shériff. Et donc, régulièrement, il pose des questions à droite à gauche tout en n’ayant aucune légitimité pour le faire. Sa vraie légitimité, c’est d’être du coin et de connaître les uns et les autres, leurs habitudes, leur passé, leurs trafics, leurs mentalités. Enfin, n’oublions pas que le roman s’intitule Les gens des collines ce qui s’avère parfaitement adapté, car Chris Offutt s’applique à nous immerger dans un petit univers et à nous en faire explorer les ramifications, avec un certain nombre de relations entre les protagonistes qui interviennent dans l’intrigue. Celle-ci ne sert finalement que de prétexte pour cette immersion. Ceci dit, nous saurons quand même en refermant le bouquin, qui a tué qui et pourquoi.
Nous découvrons que Mick a trouvé refuge dans l’habitation de son Papaw (son grand-père), habitation située à l’écart du village et raison pour laquelle il traine dans les bois. Le cadavre qu’il y trouve va justifier son enquête. Il s’avère que si Mick n’a pas réintégré le domicile conjugal, c’est parce que ce qu’il a observé l’en a dissuadé et il retarde le moment d’affronter sa réalité personnelle. D’ailleurs, sa femme est plus ou moins dans la même situation, à redouter l’inévitable confrontation, puisqu’elle a négligé d’informer Mick d’un point important concernant leur avenir. En fait, Peggy a tout bonnement cessé de correspondre avec Mick depuis plusieurs mois.
Avec Les gens des collines Chris Offutt propose donc un roman qui vaut pour son enquête policière, tout en privilégiant l’ambiance d’un coin reculé du Kentucky qu’il décrit avec sensibilité. Il mêle intelligemment des intrigues personnelles à la trame générale, sans pour autant s’étaler en longueur. En effet, son roman ne va pas au-delà des 240 pages (Gallmeister, collection Totem) et comporte pas moins de vingt-huit chapitres. D’un style agréable et fluide, le tout se lit rapidement, au point de donner la sensation finale qu’on y aurait bien consacré davantage de temps. En effet, l’auteur s’arrange pour donner chair à ses personnages principaux, grâce à leur psychologie et leurs actions, leurs perspectives. Ce qui ne l’empêche pas de donner à réfléchir avec la progression de l’enquête. Une enquête dont on pourra juste regretter qu’elle ne nous mène pas bien loin et que les ressorts qu’elle fait intervenir manquent un peu d’originalité.