Amin Maalouf, franco-Libanais ayant fui son pays natal à 27 ans pendant la guerre en 1976, découvre la France et se pose la question que doivent se poser beaucoup de binationaux : Quelle est mon identité et quelle place a-t-elle dans cette société. C’était en 1998, on pourrait dire que rien n’a changé, bien au contraire, cette question n’a jamais été autant importante aujourd’hui.
Mon identité, mon appartenance :
Dans cette première partie, Amin Maalouf se pose la question que beaucoup de Français se sont tous poser : suis-je plus français ou plus Libanais ?
L’auteur y délivre ses questionnements et ses conclusions, maintes fois entendu depuis mais qu’il n’est pas inutile de rappeler, et pour moi cette partie tourne beaucoup autour de choses évidentes. Cette première partie peut alors se résumer en une phrase :
« Pour les uns et les autres, j’insiste. Il y a constamment, dans l’approche qui est la mienne, une exigence de réciprocité qui est à la fois souci d’équité et souci d’efficacité. C’est dans cet esprit que j’aurais envie de dire, aux uns d’abord : « plus vous vous imprégniez de la culture du pays d’accueil, plus vous pourrez l’imprégner de la vôtre » puis aux autres : « plus un immigré sentira sa culture d’origine respectée, plus il s’ouvrira à la culture du pays d’accueil »
Quand la modernité vient de chez l’autre :
Dans cette seconde partie, Maalouf s’intéresse au phénomène qui touche notamment les pays arabes : Pourquoi rejeté la modernité ? Il prend en exemple les Talibans d’Afghanistan pour illustrer son propos (je vous rappelle que le livre date de 1998 et qu’aujourd’hui, on pourrait malheureusement multiplier les exemples similaires). Sa connaissance historique est intéressante, notamment sur l’histoire de l’islam et des pays arabe. Il revient sur le fait que l’Islam était beaucoup plus ouvert sur l’occident et les autres religions lorsque le christianisme était conquérant et intolérant, et se pose donc la question de cette tendance inversée. Là encore, c’est intéressant de voir ce phénomène s’accroître depuis 20 ans et rend la question encore plus intéressante.
C’est de loin, la partie du livre que j’ai préféré, et le livre mérite d’être lu ne serait-ce que pour ça. Je ne me risquerais pas d’essayer de résumer la thèse de cette partie en quelques phrases pour ne pas pourrir le développement de ces quarantaines de pages passionnantes.
Le temps des tribus planétaires :
Dans cette troisième partie, vous l’aurez compris, Amin Maalouf parle du communautarisme grandissant dans nos sociétés et tente de donner des explications, qu’on retrouve avec la partie précédente mais d’autres parallèles intéressants y sont développés.
Exemple :
« Le phénomène est complexe, et aucune explication ne peut en rendre compte de manière satisfaisante. Il est évident, néanmoins, que le déclin puis l’effondrement du monde communiste ont joué un rôle déterminant dans cette évolution. Cela fait tout de même plus d’un siècle que le marxisme promet d’établir sur l’ensemble de la planète une société d’un type nouveau d’où l’idée de Dieu serait bannie ; l’échec de ce projet, tant aux plans économique et politique qu’aux plans moral et intellectuel, a eu pour conséquence de réhabiliter les croyances qu’il avait voulu jeter aux poubelles de l’histoire. Refuge spirituel, refuge identitaire, la religion fut, de la Pologne à l’Afghanistan, un point de ralliement évident pour tous ceux qui se battaient contre le communisme. »
D’autres parallèles sont faits avec le capitalisme, la mondialisation, la démocratie, nous pouvons en conclure dans cette partie notamment que l’identité est souvent utilisée pour combler un vide : « Je suis donc j’appartiens » ; « je suis donc je suis »si on veut se la jouer à la Descartes finalement
Apprivoiser la panthère :
Dans cette ultime partie, l’auteur nous propose des solutions pour apprivoiser la panthère comme il dit ; c’est-à-dire à calmer les identités trop fortes, identités qui sont meurtrières on l’aura compris. Amin Maalouf recommande une société la plus inclusive possible (sans forcément parler d’écriture hein !) Pour que chacun se reconnaisse dans la société et ne se sente pas obliger de revendiquer son identité et ainsi la rendre meurtrière. Œuvrer donc pour que chaque citoyen soit traité comme un citoyen à part entière, quelles que soit ses appartenances.
« Toute pratique discriminatoire est dangereuse même lorsqu’elle s’exerce en faveur d’une communauté qui a souffert »
Ah bon ? la discrimination positive serait-elle une mauvaise chose finalement ? ;)
Cette dernière partie est « sympa », je n’arrive pas à me rendre compte si en 1998 c’était un scoop mais aujourd’hui les solutions proposer sembles évidentes.
Conclusion :
Une dernière partie à l’image du livre du coup : Intéressante mais une peu trop candide du coup. Soit ça ne va pas assez loin, soit on se dit qu’on est vraiment dans la merde si c’est les seules solutions que nous avons aujourd’hui ; il va falloir trouver mieux.
Car au vu de la croissance et de la place que prennent les identités, qu’elles soient religieuses, culturelles, ethniques ou sexuelles dans nos sociétés, qui soient déjà meurtrières ou en devenir, j’ai bien peur que les idées de Monsieur Maalouf ne suffisent plus.