J'ai bien aimé ce roman, même si au départ, le style, assez simple, m'a déroutée. Mais c'est assez logique, quand on part du postulat qu'il s'agit d'un roman « documentaire », et que les trois héroïnes ne vont donc pas parler comme dans un livre, puisqu'elles racontent leur histoire. Je vais commencer avec les quelques petits défauts, (qui selon moi, n'entachent pas non plus la lecture) pour aller vers les forces du roman. C'est un roman divertissant, (enfin, si l'on peut dire que lire tant de choses atroces qui arrivent à ces femmes peut être divertissant), dans le sens où il est assez difficile d'abandonner sa lecture quand on est bien lancé. Il y a quelque chose de presque envoutant dans la plume de l'autrice, on est captivés, et rien que pour ça, c'est selon moi une réussite. Mais ce que j'aurais aimé, c'est peut-être une narration qui mettrait ces trois voix en perspective, et aussi plus de thématiques. Parce qu'à part les violences conjugales, sociétales, voire religieuses que subissent ces trois femmes, il n'y a pas trop de choses à se mettre sous la dent. C'est déjà pas mal me direz-vous (et vous n'auriez pas tort !). Oui, et d'ailleurs, ça marche. Mais je pense que si le livre avait été plus long, il y aurait eu une possibilité d'enlisement de l'intrigue.
Autre chose qui a pu parfois me sortir du livre, c'est le côté démonstratif, un peu scolaire des dialogues, qui manquent du coup de naturel à certains moments. Les personnages nous parlent à nous, et non pas aux autres personnages. Personne dans la vraie vie n'explique telle règle, tel fait, de cette manière. Chaque personnage a du mal à se différencier des autres dans sa façon de parler. Bref, ça manque un peu de vie à ce niveau-là. Et parallèlement, j'ai eu du mal à ressentir de l'émotion quand j'aurais dû, j'ai eu du mal à faire preuve d'empathie quand il le fallait, parce que j'avais du mal à les voir comme des « vrais gens ». Ce qui va de pair avec un certain manichéisme. Mais l'exergue du texte qui parle de faits réels peut balayer cette critique ; je ne doute pas que les choses se passent ainsi, et j'ai apprécié que le troisième récit apporte son lot d'ambivalence. Pour les points positifs, en plus de ce que j'ai dit sur l'aspect addictif du texte, c'est aussi le plaisir que j'ai eu à découvrir une autre culture que je ne connaissais pas du tout. On sent les choses, on a l'impression de faire partie de ces concessions, de ces familles qui se déchirent. J'ai particulièrement apprécié la scène avant le mariage, où Ramla est préparée. le fait qu'on ait ensuite le point de vue de Safira, sa coépouse était une vraie bonne idée. Bref, c'est un bon roman, je pense que vous l'apprécierez, et je vous le conseille, malgré mes petits pinaillages (on change pas une équipe qui gagne, n'est-ce pas !). Mais de là à dire qu'il est bouleversant… je ne sais pas…