Hollande est de retour, enfin, chez les libraires. Après le retentissant Un président ne devrait pas dire ça… (2016) de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, l'ancien Président de la république prend cette fois-ci lui-même la plume, et cela vaut mieux. En effet, point de titre racoleur ici, juste une analyse froide, la plus objective possible bien que ce soit écrit à la première personne, mais surtout, il s'agit d'un livre écrit avec le recul nécessaire.
Après la campagne de 2017, et ses rebondissements que même les séries télévisées les plus spectaculaires n'auraient pas pu inventer. Après le renoncement de François Hollande de se présenter pour briguer un second mandat. Après l'élection d'Emmanuel Macron, son ancien collaborateur, son ancien ministre, sa créature, il était temps de recueillir les réflexions du président Hollande. Elles sont intéressantes, passionnantes et la plupart du temps (pour ne pas dire constamment) justes.
En 18 chapitres, Hollande brasse l'ensemble de son action, de ses réussites, de ses échecs, en un mot, son bilan. Il nous livre également ses réflexions sur ses anciens ministres, ses rivaux en politique et son analyse sur la vie politique actuelle. Sans oublier de proposer des idées pour l'avenir, notamment sur ce qui convient de faire du mouvement social-démocrate au XXIème siècle. Ainsi, le mot leçon n'est pas galvaudé, car d'une part, il a appris, énormément de son expérience. Et d'autre part, en apprenant de son mandat, la gauche sera en mesure de ne pas retomber dans les mêmes travers si d'aventure elle revenait un jour aux responsabilités.
Il livre par exemple un constat implacable au sujet de la fameuse fronde.
La « fronde » commence en octobre 2012 quand 20 députés socialistes
votent contre la ratification du traité de stabilité budgétaire et que
9 d’entre eux se réfugient dans l’abstention (dont 2 futurs ministres
du gouvernement d’Emmanuel Macron).
Et pour faire bonne mesure...
Au fil des événements, je comprends que les frondeurs se sont
installés dans une posture [...] et qu’ils veulent préparer une autre
candidature que la mienne pour 2017. On a vu ce qui est advenu de
cette aventure. Ils ne maniaient pas une fronde, mais un boomerang.
Au sujet du 49-3 lors du vote de la loi Macron:
«E.Macron m’exprime sa déception. Il a cru jusqu’au bout qu’il
pourrait recueillir une majorité, y compris avec l’apport de voix
venues de la droite et du centre. Ce qu’il réussira plus tard dans
d’autres circonstances...
Ironie cruelle: en ne votant pas sa loi, les députés frondeurs auront
donné à Emmanuel Macron le prétexte de sa transgression. Ils auront
signé ce jour-là leur propre disparition.
Et enfin, en parlant de Fillon et Macron au sujet de la campagne de 2017:
L'incapacité de son propre parti de mettre fin à cette équipée et son
obstination à aller tête baissée vers la défaite lèvent le dernier
obstacle qui se dresse sur la route d'Emmanuel Macron. Menant une
campagne cohérente et optimiste, attirant à lui des électeurs de la
droite modérée et de la gauche réformiste, résistant aux assauts de
Marine Le Pen entre les deux tours, il termine sa campagne d'un pas
devenu plus lent jusqu'à l’Élysée.
Mais il ne faut pas penser que ce livre est uniquement professoral, au milieu d'une analyse politique sérieuse et rigoureuse, une blague n'est jamais bien loin, on ne se refait pas. Cet humour, loin de rendre le propos léger, ne le rend au contraire que plus intéressant à lire. Qui aime un temps soit peu la politique appréciera ce livre. Et enfin, qui ne déteste pas le président Hollande sera heureux de le retrouver aussi intègre et sincère qu'il l'a toujours été.