Les Marteaux de Vulcain par Gaby Aisthé
Le temps est venu pour moi de me lancer dans la SF et de travailler un peu ma culture générale, histoire ´de faire un peu moins cruche.
Moi voici donc devant le rayon poche de ma librairie préférée et là, désespoir. Que choisir ? J'ai déjà fait une creusée dans les lovecrafts il y a quelques mois, alors autant changer, mais pour quoi ? Il était temps de sortir mon arme secrète : mon pifomètre.
J'ai ainsi laissé mon instinct dicter mon doigt le long des livres jusqu'à tomber sur les Marteaux de Vulcain. Vulcain, hummm, je viens tout juste de finir I am Spock, de Nimoy, ce doit être un signe. Et Philip K. Dick, même à moi ce nom rappelle quelque chose. Allez, zou, emballez c'est pesé.
Maintenant que vous savez tout de ma vie, passons à présent à ma critique.
"Nous autres humains n'étions que les pions de ces deux choses. Ils nous opposaient les uns aux autres comme des pièces inanimées. Les choses devenaient vivantes et les organismes vivants étaient réduits à l'état de choses. Tout était à l'envers, comme une vision morbide de l'humanité."
Ce cours passage résume assez bien à mon goût tout à la fois l'histoire et le concept évoqué par l'auteur.
Car ici, l'intérêt est véritablement le concept sur lequel repose le livre, et non pas tant sur la création d'un univers imaginaire et visuel.
La solution miracle pour que l'Humanité vive en paix est un joli rêve qui à donné de nombreux points de départ intéressants à des oeuvres aussi diverses que variées.
Nous sentons déjà ici ce que l'on vu plus tard (notamment dans Equilibrium) dans d'autres oeuvres, à savoir que les émotions et par conséquent l'individualité, l'humanité en somme, sont nocives à notre vie en société.
Les hommes avec leurs intérêts divers voir opposés, ne peuvent logiquement pas régner de manière pleinement satisfaisante pour tout à chacun.
La solution évidente alors serait d'être gouverné par un ou plusieurs êtres qui ne sauraient être influencés par leurs propres désirs, amours et inimitiés. Des êtres rationnels et incorruptibles, honnêtes et intelligents. Pas gagné quoi !
Faute de pouvoir trouver un humain pour remplir cette tâches, les humains font ici ce qu'ils ont malheureusement tendance à faire de plus en plus souvent : remplacer l'humain par la machine.
Infaillible, intelligent, capable de prendre en compte une multitude de variable et de calculer des milliers d'options, de probabilités et ce de manière posée et rationnelle.
Ceci dit, Spock nous le prouvera quelques années plus tard, l'humanité est une petite chose compliquée, jamais contente de son sort, et irrationnelle. Elle ne saurait donc pas être gouvernée par quelqu'un qui lui est si aliénée. Par quelqu'un qui soit incapable d'empathie et d'élasticité. Par quelqu'un qui ne soit pas humain.
De plus, nous avons tendance à croire que la paix et l'harmonie ne peuvent s'offrir à nous qu'en élevant sur un piédestal l'instruction et la technologie, sensées nous permettre de vivre mieux et plus intelligemment.
Tout ce qui relève du cambouis, de la terre, de la simplicité est malheureusement de plus en plus boudée. Idiot et archaïque, stupide et arriéré bref, complètement sous évalué et boudé.
Pourtant, malgré tout ce que le savoir nous apporte, malgré le fait qu'il puisse nous élever, le savoir faire reste tout aussi important dans notre vie. Il est à la base de notre société et l'élève tout autant. La simplicité, l'authenticité, le naturel nous permettent tout autant de respirer et de nous épanouir et de nous ouvrir au monde. (Bien sur, j'écris cela depuis ma tablette connectée par wifi ! Lol).
Enfin bref, ces deux éléments sont deux des piliers de cette oeuvre. Laisser la technologie gouverner et sous traiter les basses classes, laborieuses et simples. Fatalement, les non privilégiés finissent toujours par en avoir marre de se faire cracher dessus et traiter de moins que rien, même s'il leur faut parfois du temps et un petit coup de pouce.
S'entourer de haute technologie et laisser cette dernière nous gouverner laisse vite apparaître un nouveau danger, celui du contrôle. Tant que tout se passe bien, la question ne se pose pas vraiment, mais lorsque les soucis arrivent, il est souvent trop tard pour se rendre compte que ce qui ne devait être qu'une aide, un support, un outil, nous a rendu dépendant.
Dans mon jeune temps (qui ne date pas tant pourtant), j'appelais mes amies dans le salon sur le téléphone fixe et je demandais d'une voix doucette à leurs parent si je pouvais parler auxdites amies. Pour mes jeunes d'aujourd'hui, passer un coup de fil aux amis ne peut se faire qu'en privé.
De mon temps, on écrivait de petits mots en classe et on apprenait (plus ou moins) nos tables par coeur, maintenant ce sont des sms qui nous permettent de communiquer et des calculettes intégrées qui résolvent pour nous 5 x 6.
De mon temps on ouvrait un dictionnaire pour savoir ce qu'était un salangane, de nos jours on clique sur google.
Histoire de m'inclure aussi dans le lot (et de ne pas faire trop vieille conne), je dois bien admettre que si j'ai vaguement appris à me servir d'une boussole étant petite, je ne pars pas hors de ma région sans mon GPS.
Bref, si un jour nous nous retrouvions dans un monde post apocalyptique, la survie ne serait pas si facile ! Merci à qui ? (Personnellement je pense que je mourrai de déshydratation après avoir bu de l'eau croupie et m'être perdu en pleine campagne sans savoir quelles baies je peux manger)
La technologie nous aide certes, mais l'auteur pousse ici le trait à un point où l'assistanat nous a transformé en esclave.
Et en bons esclaves, les hommes ne réfléchissent plus et se contentent de tâches administratives.
Et dans ce monde logique et rationnel ou vivent ces hommes, le moindre bug est suspect et doit être supprimé. Le moindre élément doit être traité, le moindre problème éliminé.
Fatalement donc, une telle ambiance fait naître suspicion et méfiance au sein même de l'élite. Car lorsque l'on est par terre, on ne peut que monter, pas besoin de se bousculer quelqu'un, on peut toujours prendre une chaise, mais lorsque l'on est en haut de l'échelle et qu'il ne reste plus beaucoup de place pour chacun...
L'écrasement vient donc du bas et du haut, et la destruction de l'Union en devient inéluctable. Ceux d'en bas détestent ceux du milieux et d'en haut mais sont débrouillards et solidaires. Ceux - enfin celui - du haut méprise les deux autres mais détient tout le pouvoir, la connaissance et la force.
Reste du coup ceux du milieu, les classes T, hais et/ ou méprisés par les autres classes, et incapables de se faire confiance entre eux. Ceux qui pensaient être les plus forts découvrent mais un peu tard que leur puissance n'est qu'un mirage, comme toute puissance.
Dernier élément important dans ces conflits enfin, les Vulcains. Ils sont crées par les humains. S'ils sont conçus pour être logiques et rationnels, brillants et compétents, ils n'en sont pas moins les créations des humains, or toute création est marquée par son créateur. Parfois c'est une signature, un style, mais parfois ce sont des détails plus discrets
MAis qui n'en existent pas moins.je ne spoilerai personne ici, mais il est remarquable que la pomme ne tombe jamais bien loin de l'arbre, et que nous sommes toujours responsables de ce que nous créons (tout du moins dans une certaine mesure lol)
Mais assez avec les concepts de l'ouvrage, parlons un peu du reste.
Visuellement, il n'y a pas grand chose pour exciter le lecteur, c'est un fait. Nous sommes dans une société futuriste, et puis c'est tout, à chacun d'imaginer ce que cela pourrait devenir dans les détails.
En revanche, les personnages sont assez sympathiques, spécialement (et c'est le but), celui de Barris, homme moyen qui n'était pas sensé sortir du lot... Sa réflexion, sa sortie laborieuse de la caverne où son esprit comatait est intéressante à suivre et son engagement, son choix de ne pas suivre un assassin, et donc de.... Meuhhh non, pas de spoiler, promis. Bref, son choix est bien pensé.
Pour ce qui est des points négatifs, il y en a (peu, mais il y en a), et je ne peux faire l'impasse dessus.
Déja, le goût de trop peu. Moi qui ne suis pas dans une période de boulimie littéraire, j'ai lu ces marteaux de Vulcain en 5 jours (en temps normal, je l'aurai donc lu en 2 jours lol)... Développer un peu tout cela n'aurait pas fait de mal... Ou en tout cas, ca ne m'aurait pas fait de mal lol.
Ensuite, le style, l'ambiance. J'ai mis un petit moment à vraiment décoller, et je dois admettre que durant les premières pages, je me sentais un peu comme dans le meilleur des mondes. Une petite idée de déjà ressentie.
Le concept attractif et bien traité fait de ce livre un ouvrage sympathique et qui se laisse lire, mais sans en faire quelque chose de vraiment transcendant.
En espérant que les autres K. Dick soit meilleurs que celui ci, je ne regrette pourtant pas de l'avoir lu et encourage les non initiés comme moi à en faire de même.