Il m'aura fallu un petit mois pour savourer ce petit bijou ! Quand j'ai vu qu'une version remasteurisée des Chimères de Mirinar était dans les tuyaux chez Mnémos, j'étais dans les starting, blocks, précommandé et reçu le jour de la sortie ou quasi. J'ai distillé ma lecture parce que je ne voulais pas le finir trop vite, je voulais profiter de cette redécouverte, sachant que j'étais fana de l'univers, des personnages, de l'histoire et du bestiaire, découvert avec la première version en auto-édition (dont j'ai les tomes 1 et 2 dédicacés - la classe). Bref, je m'étale...
Pour vous faire court (exercice délicat tant l'univers est complexe), on est dans un monde urbain où trois héros du temps passé, le stratège, la sage et le mage, ont créé la société dans laquelle prend place l'intrigue. Zoom sur la ville-capitale de Mirinèce où les clivages entre quartiers sont exacerbés par les rebuts, mutations dues à une maladie qui entourent la ville et y font parfois des incursions. Une nouvelle menace rôde les blasphèmes : sorte d'amas gluant et suintant, capable d'absorber tout être vivant. Les personnages : soldats, mercenaires magiciens, hauts pontes, religieux. Entre magouille politique et recherche de gloire, la jeune Elsy Valnitier, mercenaire ambitieuse et au caractère plus que vif, pour ne pas dire que c'est une sacrée "connasse" pour reprendre les mots doux dont elles s'affublent mutuellement avec son amie d'enfance, Elodianne, magicienne miroitiste, dont elle s'est peu à peu éloignée, va être engagée pour retrouver celui qui manipule les blasphèmes et le neutraliser.
En toile de fond, on trouve tout un panel de personnages secondaires absolument géniaux. Les auteurs gomment les limites entre bons et méchants. Tous les personnages ont cette ambivalence que j'adore retrouver en fantasy : des héros peu scrupuleux, des "méchants" campés par une bande d'ados surdoués en mal de reconnaissance finalement assez similaires à ce qu'aurait pu devenir les héros s'ils avaient fait d'autres choix. Chaque camp a ses raisons plus ou moins valables et on en vient à s'attacher à certains aspects de ces personnalités d'écorchés vifs : l'inventivité d'Eldée, la fragilité de Noélien... et Loulou est un personnage que j'ai adoré. Elsy est une sacrée emmerdeuse mais ses failles craquellent le vernis de l'ambition et la rendent terriblement attachiante, comme Elodianne (même si elle est un peu moins développée). Dans le rang des alliés comme des ennemis, on ne peut s'empêcher de s'attacher à tout ce petit monde. Damnis et Teliam veillent sur le tout et créent du liant à l'ensemble, chacun à leur manière. Sans oublier le bestiaire génialissime : entre rebuts, blasphèmes et asparences vous serez servis comme jamais.
L'intrigue est émaillée de petits rappels historiques bienvenus, de souvenirs éclairants qui permettent de raccrocher les wagons dans cet univers tentaculaire aux multiples visages. Mes scènes préférées sont les souvenirs d'enfance communs d'Elsy et Elo, la bataille de Lazirac sur les différents plans, le mystère autour du personnage de Teliam.
Je tiens à préciser pour les âmes sensibles que certaines scènes sont assez gores et violentes. Mais l'ambiance sombre de l'histoire est vraiment réussie.
C'est une histoire pour ceux qui aiment ne pas avoir toutes les réponses et laisser une part d'imagination, car tous les mystères sont loin d'être éclaircis à la fin de ce livre mais l'ouverture laisse présagée une suite... (s'il vous plait ?!!!), on aurait envie de retrouver la petite bande dans une nouvelle mission périlleuse et en apprendre plus sur le passé de chacun et leurs liens : j'adorerai découvrir en détails comme Elsy a rencontré Ohya par exemple, pour ne citer que ça.
Comme tous mes coups de coeur, j'ai du mal à conclure mon avis, si ce n'est un conseil pour les amateurs de fantasy sombre, de monstres totalement inédits, d'intrigue politique et religieuse en sous-main, d'héros loin d'être héroïques et de méchants qui ont leurs raisons ; lisez ce livre et éclatez vous à arpenter Mirinar, côté réalité ou côté monde-miroir, vous trouverez forcément une cause à suivre et si y'a un peu de 'velle à se faire, pourquoi pas !!