Un très bel ouvrage que les éditions Pléiades nous fournissent.
Non, la philosophie n'est pas née avec Socrate et Platon, puisque Pythagore, en son temps, initia le concept. Non la philosophie n'est pas qu'une affaire de littéraires ou de spéculations éthiques. Bien avant Descartes il s'agit d'expliquer le monde, sans phénomènes mythologiques, sans magie, mais en cherchant une explication les dépassant et qui trouve sa source dans le réel.
La Pléiade nous offre ici, comme souvent avec cette édition, une lecture agréable, avec de nombreuses notices biographiques et explicatives précieuses. Il est agréable en outre de lire non seulement des fragments épars, mais également des synthèses données par les auteurs postérieurs aux présocratiques et qui avaient pu, en leur temps, lire tout ou partie de leurs ouvrages.
Seul bémol, un certain conformisme de présentation, qui dépasse le seul cas de la Pléiade, qui conduit à classer comme Présocratiques des penseurs qui furent plus des contemporains de Platon et de Socrate que des précurseurs qui auraient été réfutés par ces derniers.
Cela n'enlève cependant rien à un ouvrage qui vous permettra de vous familiariser notamment avec la pensée de:
- Thalès, fondateur de la première grande explication du fonctionnement du monde chez les grecs qui repose sur autre chose que la religion d'Homere ou d'Hésiode
- Pythagore et ses disciples, fondateurs du concept de philosophie et adeptes de l'explication du monde par les nombres;
- Héraclite, dit l'obscur et explicant le monde par le mouvement et le feu
- Parménide, le premier a avoir distingué l'être et le non-être et qui pensait au contraire le monde immobile
- Empedocle, mi philosophe mi poète, qui croyait aux quatre éléments et à une force, l'amour qui les unissait et une autre, la discorde, qui les séparait
- Anaxagore qui fut un temps le maître à penser de Socrate
- les Abderitains et notamment Democrite, contemporain de Socrate et fondateur du courant atomiste (avec Leucippe)
- les Sophistes, Gorgias, Protagoras ou encore Antiphon, tant moqués par Platon. Mention spéciale pour le plaidoyer pour Hélène de Gorgias, qui mérite le détour.
Et tant d'autres, que j'oublie de citer ici et qui ont en commun avec les précités que leurs ouvrages ont disparu (on peut d'ailleurs lire des passages où Aristote par exemple ou Cicéron constate la raréfaction des ouvrages de certains des intéressés) et que seuls des bribes ou des synthèses de leurs pensées sont arrivées jusqu'à nous.
S'il est inutile de tout essayer de lire d'une traite, on ne peut que revenir sans cesse se désaltérer à cette source, qui au-delà de l'actualité de tous les propos permet de s'émerveiller sans cesse de la capacité d'abstraction et d'imagination de l'esprit humain pour saisir et parfois trouver sans avoir aucun de nos outils actuels, les clés de compréhension de notre univers.