Le créateur du Trône de Fer n’est pas que l’auteur d’une seule sage : il est également un écrivain prolifique et doué. Pour preuve, cette compilation de nouvelles.
La première, et sans doute la meilleure, est Par la Croix et le Dragon. On y fait connaissance d’un inquisiteur de la Nouvelle-Rome ayant perdu la foi, chargé de défaire une hérésie réhabilitant Judas Iscariote et introduisant les dragons dans la Bible. Le mélange de space-opéra, de religion, de réflexion sur le mensonge face à la perte de repères et de valeurs, tout cela fait de cette nouvelle un excellent texte.
Âprevères nous emmène aux côtés d’une jeune femme, dans un environnement froid et hostile, dans son voyage (perdu d’avance) vers la sécurité et le confort de son foyer. A deux doigts de mourir, de froid, de faim ou dévorée par les vampires, elle est sauvée par une femme étrange, Morgane, vivant dans une capsule métallique. L’histoire nous narre le voyage de cette jeune femme, sur sa planète et bien d’autres, aux côtés de Morgane. Je n’ai pas trop accroché à ce texte, mais bon, question de goût.
Dans la Maison du Ver nous fait découvrir une curieuse société vivant sous terre et adorant le Ver Blanc. Ridiculisé par le Viandard, un chasseur de grouns, une race d’être hostiles, le héros va s’enfoncer dans la noirceur des souterrains afin de tendre un piège à son ennemi. Le piège se refermera sur lui, et il devra errer dans un environnement ne lui laissant que peu de chances de survie, où il découvrira que la guerre que se livrent les fils du ver et les grouns ne sont que pécadilles par rapport aux dangers qui les guettent tous. Un très bon texte, encore, qui nous fait trembler face aux périls des Vers. Bien entendu, le héros est assez tête-à-claques, mais bon…
Vifs-Amis nous conduit dans un vaisseau spatial, à la recherche de Sombres, des créatures d’énergie pure, et de Vifs-Amis, la symbiose (risquée) entre humains et Sombres, disposant de pouvoirs phénoménaux. Le héros veut rencontrer Mélissa, son amour devenue Vif-Amis, mais qu’il n’a pas pu se résoudre à suivre dans ce dangereux processus de transformation. Un texte qui dénote un peu, du fait de son caractère particulièrement mélancolique, mais parfaitement maîtrisé et bien intégré au reste des nouvelles.
La cité de pierre a pour sujet la recherche d’un nouveau départ. Coincé sur une planète-étape, le héros cherche à tout prix un vaisseau sur lequel embarquer pour fuir la planète où il s’est échoué, afin de continuer son périple vers les étoiles. Mais cela se révèle bien plus dur que prévu. On notera ici la grande place donnée à tout un bestiaire de races extra-terrestres, aux descriptions de cette ville cosmopolite, et à l’usage fréquent de flash-back nous permettant de mieux comprendre le pourquoi de la quête des étoiles du héros.
La Dame des Etoiles nous raconte les aventures d’une jeune femme, accompagnée d’un enfant à la peau dorée et aux cheveux d’argent, qui ne trouve de secours qu’auprès d’un proxénète estropié qui n’aura rien de plus pressé à faire que d’ « utiliser » ses protégés pour gagner quelques faveurs. Mais c’est sans compter sur ces rivaux. Cette nouvelle est assez déstabilisante : on nous annonce dès le début qu’il n’y aura ni « héros », ni « méchants ». De même, la fin nous révèle que « certains mourront, certains vivront », sans plus de détails. Assez curieux. De plus, l’auteur s’emploie à utiliser un argot spécifique à la planète, ce qui n’aide pas à la compréhension initiale. Mais bon, le résultat est plutôt sympa et se laisse même assez vite lire, la « faute » à un univers comme toujours très riche (j’adore particulièrement le Chat Boiteux, un expérience ratée de mutation entre homme et chat).
Les Rois des Sables nous conte les mésaventures de Simon Kress, un riche homme d’affaire qui collectionne les créatures les plus étranges et les plus fascinantes de l’Univers. Ses derniers protégés n’ayant pas survécut à une longue absence, il trouve pour les remplacer les Rois des Sables, des créatures insectoïdes dont le monde de vit suppose une guerre et des jeux d’alliance d’avec leurs congénères, ainsi qu’une adoration de leur propriétaire. Cependant déçus par la lenteur du processus, Simon va, à l’encontre des recommandations de la vendeuse, forcer un peu les choses en les affamant et se livrer à des soirées de paris quant aux résultats des guerres menées. Mais les choses dérapent assez vite, et les Rois des Sables sortent de leur terrarium pour investir la maison. Il n’aura de cesse de chercher un moyen de se débarrasser d’eux.
Ce qui m’a attiré dans cette nouvelle, c’est le souvenir d’un épisode d’au-delà du Réel vu il y a ça bien des années. Et à priori, la ressemblance est même plus que marquée : c’était purement et simplement l’adaptation télé de la nouvelle. Et j’avoue avoir adoré ce texte, sur l’évolution des Rois des Sables, sur les difficultés de Simon et sur la vengeance des créatures sur leur propriétaire.
Un très bon recueil qui prouve, s’il était encore besoin, que George R. R. Martin est un excellent auteur qui n’a pas hésité à laisser courir son imagination dans diverses directions et ce pour notre plus grand bonheur.