Rachid Benzine fait renaître une voix afin qu’un fils retrouve le chemin de son passé.
“Je prie chaque jour pour vous retrouver.
J’espère que vous êtes fiers de moi. ”
Cinquante-six ans plus tard, son fils écoute cette voix d’avant lui, d’un homme jeune, comme lui maintenant. Cette voix raconte à son père et sa mère la dureté de sa vie, sa tristesse d’être loin d’eux. Elle les rassure pour qu’ils cessent de s’inquiéter.
Après la toilette rituelle, après l’enterrement, qu’après avoir vidé l’appartement, le fils, devenu pianiste, de renommée internationale, entend pour la première fois la voix de son père. Elle lui parle de son exil, de son travail, de ses renoncements pour donner à ses enfants, la chance que leur vie soit différente.
La voix d’un père qui n’a jamais rien raconté, rien révélé, rien partagé de son exil. C’est le subterfuge littéraire, ou le récit d’une réalité, qu’importe, que propose Rachid Benzine pour que l’on écoute enfin cette génération de migrants qui a tout sacrifié pour que leurs enfants puissent avoir un autre avenir.
Rachid Benzine propose un roman magistral où la parole éclaire un passé trop souvent silencieux. Terriblement émouvant est cette quête sur les traces d’un père à jamais absent. D’autres voix vont montrer au fils de qui il est le descendant, lui qui a oublié d’où il était venu.
Richard Benzine décrit avec pudeur l’amour du père pour ce que son fils est devenu redonnant à celui-ci toute la force de son admiration.
D’une grande beauté, ce roman se lit aisément sachant susciter émotions et affections. Car, ces anciens “chibanis”, nous les regarderons différemment, leur redonnant la fierté dont ils ont droit.
Chronique illustrée ici
https://vagabondageautourdesoi.com/2023/09/10/rachid-benzine-les-silences-des-peres/