Humour et dureté dans une histoire désenchantée où on s'y sent bien.


-Pour la reine je comprends, mais vous, pourquoi vivez-vous dans un immeuble défendu aux hommes?
-Quand on se met au régime on ne va pas s'installer dans un magasin de pralines!
- C'est donc un régime? demande Juliette.
- On n'a pas renoncé à l'amour.
- C'est très beau l'amour, le véritable amour.
- On à renoncé à l'espérance folle de le vivre.
- Aux montagnes russes.
-À la polygamie.
-À vouloir rapprocher le pôle Nord et le pôle Sud.
-Au bricolage quotidien, à recoller mille fois les morceaux.
-À perdre la raison quand on découvre que l'autre n'est pas celui qu'il faisait semblant d'être.
-À se diluer, se contorsionner, se rogner les ailes pour plaire.
-À se laisser rouler dans la farine pour une caresse, un mot doux.
-À devenir pathétique.
-À perdre tous ses neurones et rester accro à une relation toxique.
-On ne peut pas se protéger en amour.
-La seule protection, c'est l'abstinence!
ELLES SONT FOLLES !



L'immeuble des femmes qui ont renoncé aux hommes est un roman souriant et distrayant premier livre de Karine Lambert à qui l'on doit à présent des œuvres comme '' Un arbre, un jour; Eh bien dansons maintenant !; Toutes les couleurs de la nuit...'' Un livre qui ravit de par sa légèreté et son contexte touchant dans une histoire profondément humaine à l'écriture fort sympathique où l'auteure parvient parfaitement à dépeindre ses personnages.


Tout d'abord bravo au choix du titre qui est sacrément tappe à l'œil et prometteur avec une couverture et un résumé qui donne envie.


Je tiens à rassurer certains, malgré son titre ce livre n'est pas un récit féministe dans sa forme la plus pure avec ses combats, rien à voir. C'est une histoire basée sur l'affliction profonde due à un passif difficile par des femmes qui n'ont pas réellement renoncé aux hommes mais simplement à l'espoir d'une vie commune avec eux.


Juliette est une jeune femme de 31 ans pas du tout chanceuse en amour qui emménage temporairement au deuxième étage d'un immeuble pas comme les autres. La caractéristique de celui-ci vient qu'il est scrupuleusement interdit aux hommes. Un bannissement venant de la propriétaire surnommé '' La Reine '' résidante tout en haut du bâtiment d'où son surnom, ancienne grande star de la danse et de l'Opéra ne supportant plus de voire son corps vieillir. Un choix de vie convenant parfaitement aux 5 locataires ayant toutes un lourd passif avec les hommes.


Au premier étage il y a Giuseppina la caractérielle sicilienne cinquantenaire profondément blessée par son père et ses frères. Comme elle dit si bien:



Finito! Basta!
La famille sicilienne: uno poulpo con tentacoli!



Au deuxième étage il y a Carla partie en Inde plusieurs mois laissant sa place à Juliette qui clairement ne comprend pas le règlement refusant les hommes. Vient au troisième étage ma préférée la campagnarde et sincère Simone 59 ans et son chat Jean-pierre le seul mâle accepté. Puis au quatrième étage la fragile prof de yoga Rosalie.


Le groupe quelles formes est absolument magnifique, beaucoup d'échanges sincères et de profondeur les unies. L'immeuble dans lequel elles vivent le '' Casa Celestina '' transpire la joie et la gaieté même si on ressent en son fond une amertume profonde bien caché et l'attente que Juliette essaiera de rompre. La description dont il fait preuve est délectable, on aimerait y vivre.


La puissance de ce récit et qui fait tout son intérêt vient de ces personnages principaux, de ses 6 femmes qui ont toutes eu un parcours différent qui les ont toutes amenées à se retrouver dégoûtées et blessées par les hommes. C'est entre elles dans la Casa Celestina qu'elles vont réussir à retrouver un semblant de vie par un lien profond d'amitié conduisant à des relations plaisantes et drôles.


Le traumatisme qu'elles ont subies par les hommes est une plaie encore grande ouverte laissant de fortes séquelles dictant continuellement leurs vies. Ce n'est pas pour autant qu'elles les détestent, bien au contraire mais elles refusent de dépendre à nouveau d'eux. À la vue des diverses histoires de chacune (trahison, lâcheté, violence, abandon... ) l'on peut comprendre les raisons d'un tel choix. Les hommes c'est à l'extérieur à petites doses et surtout sans la moindre espérance.


L'écriture de Karine Lambert est relativement simple mais agréable avec quelques difficultés de transition entre les personnages ce qui fait que des fois on ne sait plus avec quelle femme on est. La narration se construit autour des souvenirs des personnages laissant peu de place au contexte principal ce qui en soi n'est pas forcément pour me déplaire car cela alimente le background des héroïnes.


C'est drôle, rythmé, émouvant, avec de bons moments qui ont réussis un moment donné à me faire tirer la larme. L'histoire est un peu convenu avec des moments assez cliché il faut le reconnaître mais c'est tellement bien approprié aux événements que cela en est drôle. Le passage avec le professeur de danse italien Carlos est un parfait exemple, hilarant à souhait et terriblement bateau mais ça fonctionne.



-Ma ké tou é belle, mi amor.
Tou a été oune tré bonne élève. Hasta luego poupée !



Pareil avec la recherche pour trouver le grand amour sur Internet de Juliette avec une panoplie de profil burlesque.



Elle clique pour ouvrir des profils.
'' Ah ! Un voyageur... ça m'intéresse ! Il va où, le voyageur? ''
Profil: Au Québec pour six mois.
'' Mauvaise pioche ! Suivant !



J'ai réussi vers la fin à deviner (du moins seulement en partie) son final ce qui peut-être regrettable mais pour une telle histoire ce terme me semble le plus approprié. La conclusion est très simple mais fort heureusement on n'est pas non plus dans le happy end '' elles vécurent heureuses et eurent beaucoup d'enfants ''. On ne sait pas si elles arriveront un jour à trouver le pardon et la force de tout recommencer, les consignes pour y arriver sont données, mais le résultat lui n'est par sûr et certain ni démontré et c'est là l'intelligence de Karine Lambert.


Beaucoup de références au cinéma et autres chansons qui font plaisir. Ainsi on se retrouve pour mon plus grand plaisir moi qui adore avec Le Silence des agneaux avec la fameuse réplique du '' Chianti '' d'Anthony Hopkins, La petite maison dans la prairie, Sur la route de Madison, Vol au-dessus d'un nid de coucou... mais aussi des noms de stars comme Al Pacino, Michelle Pfeiffer, Bénabar, Jean-Pierre Bacri (l'inspiration pour le prénom du chat)...


Je retiendrai surtout de ce roman une texture d'espérance nous démontrant plein de choses sur la vie, l'amour, le pardon, les blessures, le courage et l'amitié dans lequel on en apprend plus sur la nature humaine et leurs sentiments. Un feel good qui n'en est pas totalement un dans lequel on se sent à l'aise donnant dans un premier temps une vision dépressive des choses pour ensuite servir d’antidépresseur redonnant le sourire sur sa fin sur un fond dramatique. Une version pas si édulcorée de la vie de par les événements durs vécus mais encaissés avec les bons moments, la vie tout simplement.


CONCLUSION:


L'immeuble des femmes qui ont renoncé aux hommes est un roman écrit par Karine Lambert plaisant à lire délivrant des notions sur la vie de manière perspicace. Le récit de ces superbes femmes est un plaisir à suivre. Elles montrent toutes une abondance de sentiments dans un enrichissement de personnalités totalement différentes rendant le tout plus éclatant. L'écriture est plaisante même si quelques points négatifs sont à relever mais rien de bien méchant.

En définitive j'en retiens un livre d'une justesse surprenante avec les sentiments de ses héroïnes qui est malheureusement bien trop court avec ses 215 pages.


B_Jérémy
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le 15 juil. 2019

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