Si nous sommes en 2036, ce n’est pas l’avenir que nous fera envisager le narrateur, mais plutôt un retour sur l’enchainement qui a abouti à la situation désastreuse qu’il évoque : une vie terrée, un confinement quasi-permanent , les rares sorties nécessitant un harnachement lourd. Le virus qui circule est doublement pathogène, car il est devenu radio actif !Tout était en place pour une telle issue : dans son enfance le narrateur vivait dans une cité dont la plupart des résidents étaient employés à la centrale proche. Malgré les protestations des opposants au nucléaire,, malgré les incidents répétés, malgré la leçon de Tchernobyl, la politique de l’état s’est acharnée à développer le parc des centrales nucléaires, se rassurant à coup d’arguments de progrès technologiques et détournant le regard des énormes quantités de déchets qui s’accumulaient.
Cette période est celle d’une prise de conscience, pour le narrateur. Avec en corollaire un conflit interne, l’ado écartelé entre l’allégeance à sa famille, et les doutes sur le discours rassurant du père, sans compter la fascination qu’exerce sur lui ce monstre qui à la fois le menace et le nourrit. Il finit par choisir son camp, sur des arguments qui n’ont peut-être finalement rien à voir avec la raison.
La dystopie inversée existe t-elle ? Je la verrais comme un retour sur l’histoire pour comprendre la situation. C’est exactement le propos de ce roman qui se lit avec angoisse, puisqu’il nous place, nous lecteurs, dans une situation analogue à ce qui a produit la catastrophe. Avec, on le sent bien, peu de marge d’action pour inverser le processus qui a été installé il y a longtemps.
Une lecture très interessante, d’autant que la plume acerbe sert parfaitement le propos.