Épictète, l’esclave grec qui a inspiré l’empereur romain avec ses préceptes stoïciens, sa sérénité intérieure face à la tornade de la vie. Dans son manuel, qui fut rédigé par son disciple Arien, Épictète dévoile son credo devenu célèbre et abondamment repris : ce qui ne dépend pas de toi ne doit pas t’affecter. En effet, comme nous ne contrôlons pas moult choses en ce monde, alors il est plus sage de ne pas s’en mêler.
Pour lui, la mort ne dépend pas de nous, ni l’opinion des autres, ni la gloire, etc. Il appelle donc à oublier tout ça, plutôt à accepter notre incapacité à avoir une influence dessus, volonté stérile qui serait source de nos malheurs.
Au contraire, ce qui dépend de nous, c’est-à-dire tout ce qu’il se passe en notre for intérieur, nous devons y accorder toute notre attention. Nos pensées, raisonnements, désirs, sont sous notre contrôle, et il n’y a rien d’extérieur qui ne doit venir parasiter ce qui nous appartient, rien d’extérieur ne doit venir troubler notre âme, c’est le principe de l’ataraxie, fondement de la pensée stoïcienne.
À travers des métaphores pertinentes ou non, Épictète a désir de nous guider pour nous aider à nous recentrer sur la seule chose qui compte : la conscience de notre incapacité à modifier les aiguilles de l’horloge cosmique. C’est une exhortation à la modestie que je rejoins, mais qui n’est pas applicable en ce monde, tant les gens sont corrompus par la course à l’égo.
Si tout le monde appliquait ces conseils, il ne passerait pas grand chose, alors ce serait agréable car on ne serait pas emmerdés par la bruyante faconde éructée par ceux qui ont tout vu et tout fait et qui pensent avoir la solution pour résoudre chaque crise majeure, on ne serait pas emmerdés par les Youtubeurs ou autres merdes malsaines et narcissiques propres aux réseaux sociaux, mais la production culturelle, par exemple, en aurait souffert. Il faut bien se fier à l’opinion des autres (dans le sens experts en la matière) pour progresser dans un art quand on débute. Et pour la question de la mort, Victor Hugo l’illustre bien dans son Dernier Jour d’un Condamné : quand le condamné entre dans son cachot, il commence à philosopher sur ma mort, dit que les hommes sont tous condamnés avec des sursis indéfinis, puis finit par balayer toutes ces réflexions en déplorant le sort horrible qui l’attend. Il sait qu’il va mourir dans quelques jours, et se fiche bien de l’approche stoïcienne de la question, elle ne l’aide pas à accepter sa mort.
Ça résume bien ma critique du stoïcisme : c’est bien beau de faire des belles phrases, mais lorsque l’on est confronté à la douleur, la vraie, elles paraissent bien ridicules. Alors oui, comme dit plus haut, j’adhère à beaucoup de choses, notamment dans le rejet du matérialisme, mais surtout dans l’approche de l’idée du côté éphémère de l’humain et dans le besoin de laisser de côté ce qui ne dépend pas de nous afin de ne pas finir en connard volubile donneur de leçon, mais la majeure partie de la doctrine n’est que poudre aux yeux face à la cruauté de la vie.
D’ailleurs, les contemporains qui louent le stoïcisme sans relâche sont souvent les adultes qui ont eu une enfance paisible.