Le style de Robert A. Heinlein se veut assez accessible. L'écriture est vive et efficace, mais manque énormément de subtilité. Par ailleurs l'auteur survole souvent l'action, ce qui donne un ensemble franchement creux. Le manque de développement rend impossible la moindre empathie pour les personnages, et le fait qu'ils soient tirés jusqu'à l'extrême limite du cliché les rend insupportables par dessus le marché.
D'un autre côté, le livre se lit très vite au final, avec une maîtrise du rythme évidente. Par ailleurs l'histoire, bien que très superficielle, tient la route d'un bout à l'autre et les quelques rebondissements présents réussissent à amuser. Une fois ou deux.
Passé ce constat, je dois avouer que j'ai trouvé le reste plutôt nul. Ce qui est plus gênant, c'est que les personnages sont trop souvent de gros clichés ambulants, à la limite du lourd dingue.
Mary (Alluquercque) est présentée comme une femme espion dure et incassable, puis se transforme en caricature de la femme faire-valoir dès le premier tiers du livre, minaudant une phrase sur deux et gloussant comme une dinde...
Sam (Élisée) jongle constamment entre l'archétype de l'espion inoxydable à la James Bond et l'amoureux transi. C'est juste insupportable. Seul le personnage du Patron est assez poilant, car positionné avec justesse sur un socle de Grand Manitou omniscient et bourru. Ses répliques sont un condensé de bonnes grosses vannes qui tachent à l'Américaine, mais elles sont bien marrantes quand même.
Certaines situations échappent (malgré elles ?) à la caricature grâce à un comique de situation assez bien trouvé. L'action se situant dans un futur post apocalyptique, on a le droit (en dehors de tous les clichés de Science-Fiction possibles) à quelques passages savoureux sur l'évolution des moeurs. Par exemple la scène de mariage se déroule devant un préposé de mairie quelconque, qui propose un mariage pour six mois, renouvelable ou non. Évidemment les personnages choisissent la version à vie. Impensable...
Le passage de la baffe que Mary donne à Sam est pas mal non plus. Elle en a reçu une par un autre personnage sous l'influence de Sam, elle lui caresse la joue en lui promettant que c'est oublié. Elle se retourne à moitié, son visage change d'expression, fait face à Sam et lui en colle une qui lui décroche presque la mâchoire, avec un effet lifté du plus bel acabit.
Ce genre de passage est devenu marrant parce que le reste est à la limite du consternant. Mais au moins on se marre.
Revenons sur les rebondissements. Seuls un ou deux sont à la limite intéressants, les autres amusent ou navrent selon le cas. Le patron qui se révèle le Père de Sam, c'est tellement gros qu'on ne croit pas ça possible. Et si...
Beaucoup sont dans ce cas là. Dommage.
L'immersion n'est pas vraiment possible à cause de la faible épaisseur de la trame. Aucune réelle ramification ni chemin de traverse. tout est couru d'avance.
Au final on a donc un livre qui se lit facilement, au style d'écriture très facile d'accès, mais qui manque cruellement de subtilité et de profondeur. Là où un Guillaume Musso ou un Bernard Lévy sont d'une nullité absolue et vraiment illisibles, ici on a quand même une maîtrise suffisante du rythme et de la narration pour que l'on puisse suffisamment suivre l'histoire. C'est déjà ça. Et c'est d'ailleurs ce qui m'a surpris. Je ne me suis jamais ennuyé. J'ai été porté à bout de bras par une histoire trop simple mais intéressé quand même.
Peut être parce que j'étais en vacances, peut être parce que l'auteur à ce talent de créer un rythme constant et un style peut être légèrement intriguant...
Va comprendre, Charles.