Roman biographique en costume. L’héroïne est une écrivaine (aïe…) du Moyen Âge dont on ne sait quasi rien ; j’ai tout de suite craint l’épopée d’une pionnière du féminisme farcie des topoï de rigueur. En fait c’est beaucoup plus subtil que ça. D’abord par le travail sur la langue, qui n’est ni celle d’aujourd’hui, ni un ramassis de vieux mots et tournures sentant le parchemin moisi : non, c’est truffé de vieilles expressions mais qui paraissent toutes forgées pour l’occasion (bon, je n’ai pas vérifié !), et cela non pas à la façon d’un faussaire mais à celle d’un poète - d’une poétesse en l’occurrence. Ensuite l’héroïne est une femme plutôt rugueuse, dont les aspérités, les frustrations, les (ir)résolutions nous intriguent à défaut de nous la rendre sympathique ou admirable; son féminisme n’est pas flamboyant, mais construit, mûri au fil des expériences, heureuses ou malheureuses.
Seulement voilà: j’ai eu du mal à m’attacher à cette femme renfermée sur elle-même, et dont l’introversion est comme redoublée par la claustration conventuelle ; on est content des conquêtes gagnées une à une par Marie: liberté, pouvoir, plaisir; mais tout cela avance lentement. Il y aurait sûrement une réflexion intéressante à mener du côté de Marie écrivaine (ses lais écrits par ambitions, passés à la postérité; et ses visions mystiques, disparues à jamais)... oui oui sans doute… En fait j’ai fini par étouffer dans cet univers calfeutré de femmes chuchotantes.