Un marché assez étonnant : mille femmes blanches contre mille chevaux. Une manière de lier deux peuples diamétralement opposés, opposés jusque là surtout par les conflits. On embarque pour le meilleur comme pour le pire aux côtés de May Dodd, la narratrice, et du groupe de femmes dont elle va nous faire faire la connaissance.
L’histoire me semble bien documentée sur les modes de vie et la culture des Cheyennes et la plongée dans leur quotidien est de ce point de vue assez plaisante. Ces femmes vont devoir oublier leurs préjugés, leurs habitudes pour comprendre ce nouveau mode de vie et s’y adapter.
Difficile de dire si le style relativement lourd et naïf tient à la voix de May Dodd ou s’il s’agit là d’un effet de la traduction. Conséquence : je me suis platement ennuyée à de nombreuses reprises et je n’ai pas réussi à ressentir l’horreur que décrit parfois la narratrice.
Il y a certes quelques nuances salutaires, et qui posent les bonnes questions : les rituels et traditions des Indiens, leur division du travail, le vice de l’alcool, leur violence ponctuelle, sont autant de points de question de la narratrice, mais des questions qui peuvent être elles-mêmes interrogées en allant un peu plus loin. Au nom de quoi est-ce qu’on pourrait juger telle ou telle pratique barbare ? Qui sommes-nous pour les mesurer à l’aune de notre propre vision du monde ?
Alors certes, l’objectif principal du roman est, me semble-t-il, de confronter la « civilisation » américaine au peuple qu’elle a soigneusement et méthodiquement réduit. Alors certes, on peut admettre le manichéisme assez affirmé de l’histoire puisqu’il est difficile de trouver des arguments pour excuser cette expansion colonisatrice (je parle du mouvement dans son ensemble, et non de ses protagonistes séparément, lesquels avaient chacun leurs motifs, états d’esprit et dilemmes personnels). Mais le ton d’ensemble m’a semblé bien naïf et, à vrai dire, j’ai eu beaucoup de mal à éprouver de la sympathie pour la narratrice qui, en sus d’être dotée de très nombreuses qualités, couvre son récit d’un verni d’innocence et d’ingénuité assez malvenu.
Le principal grief que je porte contre Mille femmes blanches tient à ses personnages particulièrement stéréotypés et unidimensionnels. Seule Helen Flight, peut-être, possède un peu plus d’épaisseur. Toutes les autres (la Suisse, les Irlandaises, la Sudiste…) sont des images si ramassées des caractéristiques qui viennent les plus facilement à l’esprit qu’elles pourraient éventuellement être amusantes sur 20 pages, mais deviennent insupportables sur 500.
On passera également sur l’appareillement des indiens avec les blanches, lequel n’est pas plus recherché.
La succession des événements somme toute assez classique aurait pu être agréable avec de bons personnages, mais en l’absence de ceux-ci, j’ai eu du mal à trouver l’intérêt de finir cette histoire. D’autant que je l’ai trouvée extrêmement prévisible.
Que ce soit le mariage de la narratrice avec le chef, le fait que son enfant ait été conçu avec le capitaine américain, la destruction finale de leur camp par leur peuple d’origine…
Il reste que sur ce livre souffle un beau vent des plaines. Les descriptions des paysages sont un de ses atouts principaux. Mille femmes blanches fut pour moi assez anecdotique, mais il se lit facilement et n’en reste pas moins divertissant.