Quand Hekla est née, son père lui a donné un nom de volcan, sa grande passion dans la vie. Quelques années plus tard, nous sommes en 1963, elle quitte sa ferme natale pour la capitale, Reykjavik, où elle ne connaît que deux personnes, ses amis d’enfance Isey et Jon John. Isey est mariée et mère de famille, Jon John aime les hommes et rêve de devenir styliste. Hekla, elle, est écrivain. Depuis toujours et à jamais. Elle a déjà publié une nouvelle et des poèmes, sous un pseudonyme masculin.Tous trois se heurtent en plein à leur époque et à ce si petit pays qui est le leur…
« En réalité, j’ai dévoré tous les livres que nous avions à la maison dès que j’ai su lire, je les ai avalés les uns après les autres, dans l’ordre où ils étaient rangés sur les étagères et en commençant par celles du bas. Puis je les ai remontées. Les unes après les autres. Tu dois être plus grande pour certains livres, me disait ma mère quand je me plaignais de ne pas atteindre celles d’en haut. »
Elle est magique, Audur Ava Ôlafsdöttir. J’ai aimé tous ses romans jusqu’à présent et la lecture de celui-ci terminée, j’ai le coeur gonflé de tendresse et d’une délicieuse douleur. Elle est de la famille d’écriture de Laurie Colwin, et ce roman m’a également terriblement fait penser à Julia Kerninon. On y suit une héroïne brave et courageuse à laquelle on s’attache de plus en plus profondément, qui possède ce qu’on pourrait appeler de la fantaisie mais qui n’en a aucune conscience, ce qui foudroie de séduction. C’est une sérieuse, Hekla, une loyale. Une personne désireuse de s’ouvrir au monde et aux autres et qui ne vit que pour la littérature. Une pure absolument indifférente au succès ou au prestige, mais qui a un besoin vital de s’exprimer par l’écriture. L’Islande des années soixante est elle aussi un personnage à part entière, exotique car très différente de la France par bien des aspects, mais très semblable aussi quant à aux mentalités, face aux préjugés. La différence est au fond un des thèmes principaux de ce beau roman.