Critique de Shaynning
Après avoir dévoré la pentalogie "le poids des secrets" de la même autrice,me voici donc avec le tome 1 d'une nouvelle série. Cette fois, nous sommes dans le Japon contemporain, dans les année 80,...
Par
le 10 oct. 2020
**Critique de la pentalogie Au coeur du Yamato **
Les romans d'Aki Shimazaki sont comme de courtes parenthèses poétiques plongeant le lecteur dans l'intimité douce et âpre de familles japonaises. Chaque roman, ne dépassant pas les 120 pages, nous raconte l'histoire, souvent mélodramatique, de personnages dont la vie calme et sereine cache souvent de lourds secrets. Il est ainsi question d'un employé modèle confronté à un amour impossible, d'un homme à la recherche de son père disparu en Sibérie pendant la Seconde Guerre mondiale, d'une femme découvrant les secrets troubles de son mari pourtant si exemplaire ou encore d'un homme miné par le suicide absurde de son père.
Choisissant le format original de la pentalogie (série de cinq romans), l'auteure d'origine japonaise mais écrivant en français tisse une toile riche et complexe dans laquelle les histoires se font écho, et les personnages se croisent. Ces brefs romans se transforment ainsi en oeuvre complète et aboutie dépassant ces individualités pour nous dresser un portrait passionnant des failles de la société japonaise : le poids du monde de l'entreprise, le tabou de l'homosexualité ou du suicide, les cicatrices de la Seconde Guerre mondiale.
La force de l'oeuvre d'Aki Shimazaki réside également dans son écriture à la fois d'une grande simplicité et d'une grande poésie. Point de métaphore ou de phrases sinueuses. Le style est concis, descriptif mais aussi invocateur tels des haïkus. Chaque titre évoque également un fruit, une plante ou un animal dont la symbolique traverse chaque roman.
" Elle me quitte. Le bas de son manteau orange de printemps flotte au rythme de ses pas. Avant de se mêler à la foule, elle se retourne et me sourit" (Mitsuba)
" Des piétons me jettent un coup d'oeil. Certains d'entre eux remarquent l'insigne de la compagnie Goshima attaché sur le revers de ma veste. Ils me regardent avec respect et envie. Je me retourne pour voir l'immeuble Goshima. Eclairées par le soleil, les vitres brillent. J'enlève l'insigne et le mets dans la poche intérieure de ma veste ". (Mitsuba)
" Nous sommes dimanche. Il fait beau. Dans le jardin, les chrysanthèmes sont en pleine floraison. Jaune, rouge, blanc, orange ... Les fleurs brillent, éclairées par la lumière du soleil. Les moineaux gazouillent dans l'arbre du zakuro, dont les fruits sont mûrs. Le ciel est limpide, l'air pur. Nous sommes à la mi-automne, ma saison favorite. " (Zakuro, incipit)
" Je regarde le jardin, où il est tombé quelques centimètres de neige. L'arbre du zakuro en est légèrement couvert. Je me demande si ma mère aussi regarde la neige par la fenêtre de sa chambre. Je ferme les yeux et je vois l'image de mes parents qui dansent, tout vêtus de blanc". (Zakuro, fin)
" Soudain, je sens la douleur m'envahir : devant mon esprit passe l'image de mon père, seul au bord de l'eau. Sa silhouette de dos reste immobile, longtemps, comme s'il était déjà mort. A ce moment, je réalise qu'il aurait soixante ans cette année ". (Tonbo)
" J'ai enfilé mon blouson et quitté la maison avec ma mère. Le vent soufflait. Des pétales de fleurs de cerisiers tourbillonnaient dans le vent comme de la neige floconneuse. En écoutant, je réentendais la voix de mon père fredonnant la chanson Aka-tonbo. " Une libellule rouge sous le soleil embrasé ..." ". (Tonbo)
" Je regarde notre grand terrain bien entretenu. Le jardin, l'étang, les arbres, le gazon, le chemin de roches espacées ... Soudain, une douleur aiguë me saisit au coeur. Je songe au roman de Mishima, Une soif d'amour. Je vois l'image d'une vieille femme qui frappe la porte de la salle insonorisée. Elle crie les cheveux en désordre : "Au secours !". J'ai froids dans le dos ". (Tsukushi)
Créée
le 10 mai 2020
Critique lue 203 fois
D'autres avis sur Mitsuba
Après avoir dévoré la pentalogie "le poids des secrets" de la même autrice,me voici donc avec le tome 1 d'une nouvelle série. Cette fois, nous sommes dans le Japon contemporain, dans les année 80,...
Par
le 10 oct. 2020
**Critique de la pentalogie Au coeur du Yamato ** Les romans d'Aki Shimazaki sont comme de courtes parenthèses poétiques plongeant le lecteur dans l'intimité douce et âpre de familles japonaises...
Par
le 10 mai 2020
Du même critique
Dans Grâce à Dieu, François Ozon a pris la décision, courageuse et déterminée, de traiter avec une précision implacable le sujet de la pédophilie dans l'Eglise catholique, à travers un fait divers...
Par
le 24 févr. 2019
27 j'aime
6
Une idée de scénario détonante saupoudrée de thèmes d'actualité, un casting idéal avec des acteurs au sommet de leur art, un mélange subtil entre satire et drame social. Tous les ingrédients étaient...
Par
le 29 janv. 2018
15 j'aime
2
Un film de 3h15, au nom énigmatique, réalisé par une japonaise (encore) inconnue du public occidental. Voilà malheureusement beaucoup trop d'obstacles pour que "0.5 mm" de Momoko Ando sorte de si tôt...
Par
le 18 oct. 2016
12 j'aime
3