Moi, Fatty
6.4
Moi, Fatty

livre de Jerry Stahl (2004)

Cette biographie, narrée à la première personne, relate les mémoires de Roscoe Arbuckle, dit Fatty, acteur comique très en vogue au début du cinéma, et dont le scandale va précipiter la fin de sa carrière.
Conspué dès son enfance de par son poids, y compris par les membres de sa famille, Arbuckle va faire carrière au théatre puis, voyant la naissance du cinéma, et l'argent qu'on pouvait y gagner, va partir en Californie pour tourner une série de films muets, qui mettront en avant sa corpulence, dans le genre comique. Sa réussite était telle qu'il était à cette époque le seul rival de Charles Chaplin, et il gardera une amitié indéfectible en la personne de Buster Keaton, qui le fera jouer dans ses films et lui sera d'une grande utilité plus tard.

Cette carrière brillante va être brisée par l'affaire Virginia Rappe, du nom de cette actrice découverte morte à la suite d'une péritonite lors d'une soirée hollywoodienne ; elle s'était enfoncée une bouteille dans le vagin, provoquant le déchirement de la vessie !
Les circonstances font que Roscoe se trouvait dans la pièce d'à côté et que, surpris par les cris de la jeune femme, et étant en train de se changer, il a trouvé le corps alors qu'il était en caleçon ! D'où suspicion de la police quand elle le voit habillée ainsi près de la jeune femme, et Arbuckle va se trouver accusé de viol et de meurtre, et conduire à un incroyable procès où si son innocence sera étable, l'impact médiatique de cette affaire va le discréditer à jamais auprès de ses pairs et du public.

La dernière décennie de sa vie (les années 1920 - début 1930) sera à la fois triste et pathétique ; devenu blacklisté, il ne pouvait plus être acteur, ne pouvait que réaliser des films sous pseudo ou des réalisateurs qui prêtent leurs noms, jusqu'à la dernière journée de son existence où Warner lui accorda une nouvelle chance de jouer dans des film, et de réaliser sous son vrai nom, et il mourra le soir même de la signature de son contrat.

Je connaissais très peu Roscoe Arbuckle excepté dans quelques courts-métrages où sa corpulence le faisait passer un peu pour le bouffon de service, mais l'histoire de sa vie est incroyable, avec en ligne de mire les premiers excès hollywoodiens, où le sexe et l'alcool coulaient à flot.
D'ailleurs, le livre est très intéressant sur la psychologie de cet homme, à la fois impuissant (lors de la nuit de noces avec sa première épouse, il n'arrive pas à bander, complexé par son corps imposant), marqué psychologiquement par les remarques désagréables qu'on lui faisait sur son poids, et un peu naïf face à l'affaire ; il n'a pas l'air de se rendre compte du merdier dans lequel il est tombé.
Le livre raconte très bien également ce que fut le pré-Hollywood, où tout restait à faire en matière de création, et où les gens du théâtre se méfiaient de ces caméras, malgré les sommes d'argent proposées.

L'histoire du cinéma repose également sur des gens blacklistés (dont Charles Chaplin bien des années plus tard, et dont il est fait un portrait peu reluisant dans le livre sur son appétit de filles mineures), et malheureusement, Roscoe Arbuckle fut le premier de la liste, sur un terrible malentendu. C'est dans cette folle histoire, révélatrice aussi d'une Amérique puritaine, que ce livre m'a tant plu, car il se lit vraiment comme un polar, et on a très envie de savoir la suite...
Boubakar
8
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le 24 avr. 2014

Critique lue 170 fois

Boubakar

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