Je pense que l'on entre dans cet ouvrage comme l'on entrerait dans une église de village.


Un endroit sombre où règne une atmosphère froide et peu accueillante, dans lequel se mêlent trop de symboles incompréhensibles et de phrases ambiguës pour les tièdes et les raisonnables. Ces derniers, sans doute en quête de rationnel et curieux d'entrer là où c'est pour certains un refuge, sortent déçus, méprisants ou bouleversés pour toujours.


Pour ceux pour qui prennent au sens littéral le terme maison de Dieu, le livre de Bernanos comme l'église, est un endroit où règne une extraordinaire solennité et où tout, si l'on fait attention, est minutieusement détaillé et bien ficelé.


Paradoxalement, je crois qu'une espèce d'abandon est nécessaire, tout en combinant attention et humilité, afin de mieux saisir la technique et se représenter ainsi le labeur des mains qui ont façonné ce qui s'offre à nous.


Monsieur Ouine, pinacle de l'œuvre romanesque de Bernanos, et l'église de village, contiennent en eux une fresque intemporelle tout en s'inscrivant dans le siècle. La boue et le sang ainsi que la pierre et l'encens se mêlent aux angoisses et aux joies. Très loin des dévots bourgeois et des colonnes de marbre, il règne dans la campagne profonde du nord et des villages une atmosphère écrasante et infernale, où la terre semble aussi fertile au mal qu'à la sainteté.


Bernanos, écrivain de combat et de voyage, qualificatifs pas volés du tout lorsqu'on connaît le chantier du livre entre ses pérégrinations, ses ratures et ses manuscrits perdus à moto, un témoin précieux et un compagnon de route à avoir à côté de soi. Chef-d'œuvre.

Le-carnet
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 2 sept. 2024

Critique lue 24 fois

1 j'aime

Le carnet

Écrit par

Critique lue 24 fois

1

Du même critique

Électre
Le-carnet
7

Attendre Oreste

Simone Weil voyait dans cette tragédie de Sophocle un amour implicite de Dieu. Si le mythe d'Oreste a été repris par tous les grands tragiques, Sophocle s'attarde sur sa sœur, Electre, qui ne renonce...

le 31 mai 2024

1 j'aime

Monsieur Ouine
Le-carnet
9

La boue et la grâce

Je pense que l'on entre dans cet ouvrage comme l'on entrerait dans une église de village. Un endroit sombre où règne une atmosphère froide et peu accueillante, dans lequel se mêlent trop de symboles...

le 2 sept. 2024

1 j'aime

La Joie
Le-carnet
9

"une foudroyante simplicité"

Dans l'espace médiatique, intellectuels et politiques justifient allégrement et sans honte une guerre dont ils ne connaîtront ni la boue ni le sang ainsi qu'une pluie de bombes sur une population...

le 22 avr. 2024

1 j'aime