Morphine est une courte nouvelle (84 pages), terrifiante et informative qui prend place en 1917.
Boulgakov était, avant d'être auteur, médecin (Voir : Carnets d'un jeune médecin) et a exercé dans des hôpitaux ruraux de la Russie impériale puis communiste. Il a lui même développé une dépendance aux morphiniques dont il s'est débarrassé grâce à l'aide de sa femme. La nouvelle raconte l'histoire d'un médecin fictif, Poliakov, qui se suicide au début du livre et dont le journal, son "anamnèse" est lu par un autre médecin qui n'est autre qu'une projection de l'auteur lui-même.
Au fil des pages, on suit la lente descente dans l'enfer de l'addiction du Dr. Poliakov. D'abord une injection à 0,1 pour une douleur abdominale, la fréquence de ses injections double, puis triple comme les dosages des injections. Les furoncles aux points de ponctions non aseptisés, la cachexie puis la mort.
Le style rythmé et percussif de Boulgakov sert à merveille ce discours effrayant qui narre avec une rigueur très scientifique, une précision morbide le développement des symptômes de manque.
Cette nouvelle a donc un intérêt artistique avec ce style percussif du génie Boulgakov, rythmé comme du Céline avec plus de Vodka et un intérêt scientifique, médical, par la description effrayante du syndrome de manque et de sevrage.
La danse morbide de la victime et de l'objet de sa pulsion dont les conséquences les plus rudes sont tirées.