Première oeuvre de Boulgakov, lue très (trop) rapidement d'une seule traite.
Qu'ai-je à dire dessus ? La personnalité de Poliakov est très intéressante, avec ce glissement du à la morphine, puis l'essai de la cocaïne dont il s'exclame : "Le diable dans un flacon. La cocaïne, c'est le diable dans un flacon !" Boulgakov réussit à nous plonger dans l'histoire, nous ressentons la descente en enfer du médecin Poliakov, avec une belle raison de tomber dans la morphinomanie, fantasmée, j'imagine, mais qui exprime clairement tout le mal que peut faire l'amour.
Néanmoins, la nouvelle est trop courte et une incohérence flagrante m'a dérangé. Au début, Boulgakov nous dit que le journal de Poliakov finit avec des mots souvent abrégés, or, il n'en est rien, ou l'auteur et moi n'avons pas la même notion de souvent. Je pense que l'auteur aurait pu s'appliquer un peu plus dans ce domaine, c'est aussi ce qui fait la force de Le Horla de Maupassant. Ce dernier réussit à donner, au fil des dates, une angoisse liée à l'écriture folle, saccadée de son écrivain. Or, ici, l'écriture ne me paraît pas devenir de plus en plus atteinte par la morphinomanie de Poliakov, bien que ses idées et la manière de voir le monde l'est, intérêt premier de la nouvelle.
Néanmoins, malgré ces défauts, la nouvelle reste plaisante à lire, m'a l'air très proche de la réalité, et démontre bien les dangers liés aux drogues, et de surcroît ceux de la morphine, particulièrement insidieuse et sournoise car utilisée par le domaine pharmaceutique à outrance. Pour prouver mes dires, je vous rappelle que des villes entières aux Etats-Unis sont accrocs aux opioïdes car les médecins, au lieu de soigner, traitent uniquement les symptômes.
Mais là n'est pas la question, le véritable intérêt, excepté celui du changement de la vision du monde de Poliakov, lié à cette nouvelle réside dans sa proximité avec celle de Maupassant, Le Horla. Boulgakov s'est-il inspiré de cette dernière ? Il est possible, et même si ce n'est pas le cas, elle permet d'aborder la folie scientifiquement, là où Le Horla l'aborde psychiquement et d'une manière abstraite. Les deux nouvelles traitent de la folie, d'où une dynamique particulière qui rend la lecture des deux, selon moi, indispensable pour comprendre l'autre.
Je vous la conseille, elle ouvre les yeux sur la toxicomanie, et grâce à sa courte longueur, elle permet ainsi de passer rapidement dessus et d'apprendre pas mal de choses sans avoir à lire un long traité. Cette nouvelle est plutôt anecdotique, mais néanmoins plaisante.