Alcool de figue

Publié en Israël, un an avant sa mort, le dernier roman de Meir Shalev est marqué par sa vitalité et son doux érotisme, au premier abord, mais sa palette est bien plus large, dressant un portrait en creux d'une société où le culte de la virilité tient la première place. Le dispositif est simple : deux frères passent une nuit ensemble, comme ils en ont l'habitude chaque année, l'un vivant en exil aux États-Unis, et refont leur monde autour d'une ou de plusieurs bouteilles d'alcool de figue. En l'occurrence, le frère aîné s'est lancé dans une histoire qui lui est arrivée, 20 ans plus tôt, récit abondamment interrompu par son interlocuteur. C'est une manière pour Meir Shalev de digresser, de revenir sur le passé des protagonistes, leurs relations chaleureuses mais souvent teintées de reproches, voire de conflits, en référence au père et à la mère, désormais disparus, mais bien présents dans leur discussion. L'un est célibataire, d'une beauté stupéfiante qui a valu moult aventures amoureuses, l'autre, d'apparence normale, est fidèle à son épouse et n'en éprouve pas moins une certaine jalousie vis-à-vis de la vie de son aîné. Agréable à lire, même si le fil de l'intrigue est parfois distendu, Ne le dis pas à ton frère prête souvent à sourire mais son caractère ludique n'empêche pas une certaine gravité quand il s'agit d'évoquer les mœurs et la domination patriarcale en Israël, dans un pays sous tension permanente et habitué à montrer ses muscles.