Commençons par les points faibles de Neverwhere : parfois, une narration un peu maladroite, qui fait que l'on perd le fil, ou que le suspens n'est pas aussi présent qu'il le pourrait. Le fin mot de l'histoire (à savoir qui tire les ficelles derrière l'assassinat de la famille de Porte, et la poursuite de la jeune fille) est assez facilement prévisible dès la moitié du roman, ce qui gâche un peu l'effet d'annonce. Le personnage de Richard est exaspérant, avec sa normalité revendiquée et sa tendance à s'apitoyer sur son sort, et les ressorts comiques qui lui sont attachés ne fonctionnent pas toujours très bien. Soit.
N'empêche que malgré ces quelques défauts, c'est vraiment très bien. J'ai toujours eu plus de mal avec l'œuvre romanesque de Neil Gaiman qu'avec ses nouvelles ou ses comics. Mais ici, il arrive à créer un roman réellement prenant et attachant. L'univers créé est foisonnant, ce qui peut parfois être frustrant - on se prend vraiment au charme de la Londres d'En-Bbas, et on souhaiterait en savoir plus sur tous les détails et personnages qu'évoque l'auteur. Certains passages très sombres, marqués de la "patte" Gaiman, sont de petits bijou d'atmosphère et d'écriture (comme le séjour chez les moines noir ou le dénouement). L'alternance des points de vue dans les chapitres, mais si elle aide parfois à perdre le fil, concoure à mettre en place un rythme très enlevé, et il est difficile de lâcher le livre une fois plongé dedans.
Dans la préface à l'édition chez Au diable Vauvert, Gaiman dit qu'il n'abandonne pas complètement l'idée de revenir à l'univers de "Neverwhere". J'espère de tout cœur qu'il le fera. Croup et Vandemar, Serpentine et les Sept Sœurs, les Velours, le passé de Chasseur... beaucoup de mystères ne sont qu'effleurés, et pourraient donner lieu à des histoires plus développés. Et même sans ça, replonger dans l'ambiance si particulière et si riche de la Londres d'En-Bas sera toujours un plaisir.