J'ai trouvé ce texte bien moins intelligent que les précédents. Il y a toujours des passages très intéressants mais pour une fois, ils sont noyés parmi le reste. J'ai trouvé de nombreux raisonnements pas très bien ficelés. Je pense notamment à la divagation (qui aurait pu me plaire pourtant) sur l'amitié.
J'ai également été agacé par sa façon de mettre toutes les personnes le critiquant dans un même sac. C'est une façon peu habile de cacher les critiques pertinentes en les cachant avec des critiques plus stériles. C'est pour moi un élément clé pour définir un intellectuel de haute-voltige : sa capacité à repérer les critiques intelligentes dans le tas des critiques ... et sa capacité de s'en servir pour s'améliorer. Je suis très déçu que Bégaudeau soit de ceux, au moins dans ce texte, qui se pavane des critiques et s'en moque, plutôt que de ceux qui en sortent grandis.
Surtout vers la fin du texte, il m'a semblé que tout devenait confus.
Il en reste tout de même de très belles pages comme celles sur l'anarchiste et le pauvre.
Entre l'anarchiste et le pauvre quelque chose coince et toujours coincera. L'anarchiste invite à s'affranchir des chefs, le pauvre en cherche. Le premier élan de l'anarchiste est de créer du désordre, le pauvre en est repu. L'anarchiste propose un saut dans l'inconnu, le pauvre est las des giclées d'imprévisible qui lui pourrissent la vie. L'anarchiste méprise la routine, le pauvre en rêve.
Narrant le parcours d'un Gilet jaune de la Creuse, l'amie Lancelin montre que la loyauté à ses ascendants et la paternité assurent une continuité dans une existence ballotée d'un contrat d'intérim à l'autre ou menacée de basculer dans la riante nouveauté du chômage. Et ce tordu d'anarchiste voudrait qu'il bazarde la famille ? On n'est pas loin de l'injonction perverse.