Nouvelles histoires extraordinaires par ngc111
On ne se lasse pas du talent d'Edgar Allan Poe à explorer les tréfonds de l'âme humaine, à mettre sous forme de brèves histoires voir de petits contes les tortures que peut subir l'esprit humain. L'auteur américain nous parle du sentiment de culpabilité qui peut amener les meurtriers à se dénoncer, ce même sous une forme détournée, même en tentant de se berner eux-même. Il nous expose la folie des hommes, leurs obsessions maladives qui les poussent à l'acte (des dents insupportables, un art dévorant...) mais aussi leur bêtise (comme lorsque ces derniers se prennent à débattre de qui à la civilisation la plus avancée avec... une momie !).
Mais Poe est aussi un incroyable narrateur de la mort. A travers une maladie symbolique (la peste) ou dans toute autre forme, de façon allégorique (L'île de la fée) ou directe, il sait mieux qui quiconque installer une ambiance de mort, dans le sens premier du terme, avec tout ce que cela implique de décrépitude, de désespoir, de définitif.
L'auteur procède de manière amusante, il nous fait entrer dans chaque récit de manière abrupte, sans vraiment resituer le contexte, sans réelle introduction ; de même il sait créer des images dans la tête du lecteur sans pourtant l'appesantir de longues descriptions. Même au cours de la narration, même à la fin de l'intrigue ou du déroulement, il n'explique pas tout, ne justifie pas les actes des personnages, sauf par la voix même de ces personnages lorsqu'ils font office de narrateur.
Le résultat est là, les nouvelles sont rythmées, percutantes pour la plupart et donnent pourtant matière à réfléchir, à s'interroger sur l'esprit humain ; mais sur un angle nouveau, non pas celui de la cause ou de la conséquence mais plutôt sur les effets inconscients (sur le subconscient) du passage à l'acte, les effets secondaires pourrait-on dire. Avec plus ou moins de bonheur Poe utilise la science dans certains cas, la philosophie, quitte à rendre un tant soit peu obscurs des dialogues et des récits intéressants sur le fond mais plus hermétiques sur la forme. C'est flagrant dans la deuxième moitié du livre, qui a tout d'une curiosité vraiment attirante mais qui se montre de moindre qualité au final.
Recueil d'une homogénéité toutefois remarquable en terme de qualité, Nouvelles histoires extraordinaires est une preuve du talent incommensurable d'Edgar Allan Poe pour captiver son lecteur autour d'un imaginaire débordant (salué par Baudelaire), le faire frissonner devant les terribles perspectives que peut offrir le cerveau humain, lui faire sentir comme jamais ce qu'est la mort, et le plonger dans des atmosphères comme des bains d'eau glacée. Si vous ne le croyez pas, lisez juste Le Puits et le Pendule pour ressentir le véritable et oppressant sentiment de peur.
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