Roman-haiku et manifeste sur l'esthétisme oriental.
Roman-haiku. C'est Soseki lui-même qui a forgé le mot pour son texte, et je suis persuadé qu'il lui correspond tout à fait.
Je pourrais parler de sa longueur, assurément très courte, qui place le roman parmi les moins long de sa catégorie. Mais ce serait considérer uniquement le haiku comme un poème court, alors qu'il ne s'agit que d'une de ses facettes. Car ce qui transparaît du haiku dans "Oreiller d'herbes", c'est la philosophie sous-jacente à cette forme de poésie. Ainsi, le personnage-narrateur cite et compose de nombreux haikus, dans sa quête pour l'impassibilité. Ce qu'il nomme impassibilité correspond à un retrait par rapport aux passions humaines. Pour le narrateur, si un être humain peut-être sujet à l'art, c'est justement en se séparant de toutes les passions qui peuvent nous y lier.
A l'instar du haiku, il s'agit d'observer, mais sans se fondre totalement dans le sujet. une observation légèrement en retrait, de sorte à prendre en mesure la dimension artistique du monde.
Une autre thématique intéressante du roman est la volonté du narrateur d'"écrire un tableau". Il est peintre de son état, tout en ne peignant presque jamais au long du texte. Mais il conserve cette volonté de faire partager les paysages et ce qu'il voit, en essayant notamment de le faire avec des mots.
Bref, un texte atypique, avec des réflexions profondes sur la différence entre l'art "à l'occidentale" et "à l'orientale", la nature de la peinture et la philosophie du haiku. Mais assurément pas un roman pour les lecteurs en manque d'action.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.